PADMAVATI
Personajes
PADMAVATI |
Padmâvatî, reina de Chittor
Su esposo Sultán mogol Un brahmán Una doncella Noble indú Chambelán de palacio |
Mezzosoprano |
La acción transcurre en Chittor, India, a mediados del siglo
XIV.
ACTE PREMIÈRE
(Une place à Tchitor. Au fond à gauche, le Palais du Roi précédé d'une terrasse)
Prelude
Scène Première
(Gora, puis Badal, le veilleur, peuple, guerriers. Les jeunes filles étendent des tapis à terre et parent de fleurs les images sacrées. Animation joyeuse)
LE VEILLEUR Le sultan des Mogols a passé la troisième porte.
(Des hommes et des femmes accourent effrayés)
HOMMES, FEMMES DU PEUPLE Les Mogols! Les Mogols!
UNE FEMME Les Mogols dans la ville! ô malheur!
UN GUERRIER (les arrêtant) Les Mogols sont amis aujourd'hui.
(Gora s avance au bord de la terrasse)
GORA (s'adressant au peuple) Guerriers, artisans, marchands, et vous brahmanes, écoutez! Notre ancien ennemi se présente aujourd'hui dans Tchitor sans menace et sans armes. Il deviendra par un serment juré le frère de nos frères, le protecteur de nos maisons et le vengeur de nos injures. Il faut aller vers lui les mains tendues et le cur bondissant de joie, comme l'épouse au retour de l'époux.
UN GUERRIER Les Mogols ont maudit notre race!
UN MARCHAND Ils méprisent nos dieux!
UNE FEMME Ils ont tué mon fils!
UN ARTISAN Il faut se réjouir puisque c'est l'ordre.
LE VEILLEUR Le Sultan a passé la quatrième porte.
VOIX DANS LA FOULE Place! Place à l'envoyé du Roi!
UN GUERRIER C'est le prince Badal!
UN ARTISAN Il vient de saluer le sultan étranger.
UN MARCHAND Son cheval est blanc d'écume!
(Badal descend de cheval dans le fond de la scène)
UNE FEMME Son visage adolescent est grave.
GORA Que vous a-t-il dit!
BADAL Des paroles flatteuses. Mais dressé sur les étriers J'ai lancé mes regards aux confins de la plaine, L'armée est avec lui!
GORA L'armée!
BADAL J'ai vu sous le soleil luire les armes.
GORA O traîtrise!
BADAL Et les eaux du fleuve étaient noires
GORA C'étaient les éléphants?
BADAL Les éléphants de guerre qui passaient.
GORA Il faut avertir le Roi!
(Badal entre dans le palais)
LE VEILLEUR Le Sultan a passé la cinquième porte.
UN MARCHAND Hâtons-nous!
UN GUERRIER J'entends le grondement des tambours.
UNE FEMME Étendez encore ce tapis plus doux que l'herbe des clairières.
LES JEUNES FILLES Prudent Ganesha, veuille accepter ces fleurs, les roses du bonheur, les lys de la constance, le jasmin de la sagesse, puissentelles ne se faner jamais en notre ville!
VOIX DANS LA FOULE Les voici! Les voici!
LES GARDES Ecartez-vous!
VOIX DANS LA FOULE Sans un regard ils passent. Leurs visages semblent des masques d'or, la terreur rayonne alentour.
Scène Seconde
(Les mêmes, plus Ratan-Sen, Alaouddin, le brahmane, guerriers mogols. Entrée du cortège. L'escorte d'Alaouddin se masse sur la place, parmi la foule curieuse. Ratan-Sen sort du palais, s'entretenant à voix basse avec Badal. Entrée d'Alaouddin qui s'avance vers Ratan-Sen)
ALAOUDDIN Souverain d'un peuple florissant, puisse ton cur se rafraîchir toujours aux sources de la paix limpide.
RATAN-SEN Puisse la victoire toujours illuminer ton visage!
ALAOUDDIN La blancheur de ta ville m'apparaissait lointaine ainsi que la lune à l'horizon.
RATAN-SEN Je crois entendre la rumeur des batailles en tes discours.
ALAOUDDIN Si pourtant mes paroles savaient traduire ma pensée, elles seraient plus douces que le chant du rossignol.
RATAN-SEN (lui présentant la coupe d'alliance) C'est la coupe de prospérité, les dieux résident sur ses bords, nos sangs unis seront l'offrande.
GORA (au Brahmane) Nul ne doit demeurer ici pendant le rite de l'alliance.
ALAOUDDIN Ce brahmane est mon conseiller, il joindra ses prières aux vôtres. Mais pourquoi tant de hâte? Laissez-moi admirer les merveilles de ce séjour.
RATAN-SEN Que veux-tu? Les fleurs de mes jardins ou les fontaines, ou bien dans mon palais les salles hautes où fut, pour mon repos, emprisonnée l'ombre éternelle des forêts?
ALAOUDDIN A la beauté des pierres et des charpentes je préfère la beauté vivante.
RATAN-SEN La promptitude et la vigueur de mes guerriers saura-t-elle combler tes vux?
ALAOUDDIN Tu les dépasses!
Danse Guerrière
ALAOUDDIN A voir ces guerriers bondir comme des tigres, quel ennemi ne tremblerait? Mais un ami est près de toi et demande un spectacle plus doux.
RATAN-SEN Mes danseuses vont te l'offrir.
Danse des Femmes Esclaves
ALAOUDDIN On croit voir tourner des pétales de roses que la rafale entraîne. Mais ce sont des esclaves des pays étrangers.
RATAN-SEN Il est interdit aux femmes de notre race
ALAOUDDIN De se montrer aux infidèles Je ne suis plus un infidèle, ce Brahmane en témoignera.
LE BRAHMANE Le Seigneur Alaouddin, sultan des Mogols, a suivi mes conseils et vénère nos dieux.
RATAN-SEN Je ne savais pas la bravoure unie à tant de prévoyance.
Entrée et danse des femmes du palais
ALAOUDDIN Ce sont les femmes du palais; mon cur est baigné de joie. Leurs tailles sont pareilles à des lianes dor; leurs yeux, sous l'ombre des sourcils, ont l'éclat éloigné des lampes; dans leurs pieds sont des serpents aux fins museaux qui se dérobent.
(Fin de la danse. Les femmes du palais sortent en cortège)
Je devine les noms de ces beautés Celle-ci prend le sien au jasmin candide; Cette autre à la perle changeante, Celle-là au calme nénuphar. Aucune cependant n'est-elle consacrée à la fleur de perfection divine, Au lotus que vos prêtres nomment Padma?
RATAN-SEN Aucune...
ALAOUDDIN N'y a-t-il pas ici une Padmâvatî?
RATAN-SEN Que veux-tu dire?
ALAOUDDIN On peut enfermer l'or au creux des coffres; Les feux du diamant ne traversent pas les voûtes souterraines; Mais il est des trésors qui répandent au loin leurs effluves comme des fleurs dans les ténèbres.
RATAN-SEN Padmâvatî, Princesse de Singhal, est monépouse légitime.
ALAOUDDIN Est-elle indigne de sa renommée? Parle,brahmane, m'as-tu trompé?
(Pendant le chant du brahmane, Ratan-Sen délibère à voix basse avec Gora et Badal, observé sournoisement par Alaouddin. Ratan-Sen se décide enfin à faire paraître Padmâvatî et Badal va donner l'ordre)
LE BRAHMANE (avec une expression passionnée et comme dans une hallucination) Padmâvatî est l'image vivante du lotus céleste. Unique, pure, souveraine Padmâvatî! Elle respire un parfum si suave qu'un murmure d'abeilles invisibles est autour d'elle. Son corps est vêtu de clarté. Padmâvatî est la douceur de la brise des mers où la terre est flottante. Ses yeux sont les étoiles du ciel des immortels, Elle glisse dans l'air comme un cygne sur l'eau immobile des lacs. Les fleurs naissent de son sourire. Padmâvatî est le rêve dont s'éveilla le créateur des mondes; son visage est l'aurore du néant bienheureux. Vers elle les désirs de l'univers s'élancent et meurent à sa vue. Sa voix est le chant de l'oubli.
(Sur un signe de Ratan-Sen, Badal entre au palais)
Scène Troisième
(Les mêmes, Padmâvatî, Nakamti. Padmâvatî parait à un balcon du palais)
NAKAMTI (se détachant du groupe de jeunes filles) Elle monte au ciel où rêve le printemps, Dominant la terre obscure de son front éclatant, et chassant la nuit. Et la fleur s'éveille, Et l'oiseau pour elle exhale son chant, La forêt pour elle a de longs sanglots.
VOIX DANS LA FOULE Padmâvatî, ô râni Padmâvatî, que Siva te soit favorable, que Lakshmi garde ta beauté, ô fille de Singhal, ô râni Padmâvatî, que les dieux te protègent.
NAKAMTI O Padmâvatî, ô reine de nos nuits, prends pitié de nous, abaisse vers nous la douceur de tes Yeux.
ALAOUDDIN Son voile! Qu'elle écarte son voile!
(Ratan-Sen fait signe à Padmâvatî d'écarter son voile. Padmâvatî obéit et passe dédaigneuse, tandis que le peuple se prosterne sur un geste de Gora. Alaouddin se lève comme attiré et retombe sur son siège, accablé. Le brahmane s'approche de lui)
Je n'y puis croire; elle apassé; il me semble que j'expire... La nuit est passée sur mes yeux.
LE BRAHMANE Seigneur, il faut partir!
GORA Et l'alliance?
LE BRAHMANE L'alliance est trompeuse quand le cur est troublé.
RATAN-SEN Reste-t-il à mon frère un désir que je puisse exaucer?
ALAOUDDIN Je suis accablé de regrets, de bonheur et de reconnaissance; Demain, je reviendrai, maître de moi, et mon escorte plus nombreuse portera des présents dignes de vos bienfaits.
(Alaouddin descend les degrés de la terrasse du palais en s'appuyant à l épaule du brahmane. L'escorte se forme rapidement et bouscule la foule)
VOIX DANS LA FOULE Ils s'enfuient, ils s'enfuient comme des voleurs.
(Un guerrier se détache de la foule et s'adresse au brahmane qui est resté au bas des degrés)
UN GUERRIER Qui es-tu, brahmane?
UN ARTISAN Il me semble t'avoir vu à Tchitor.
UN GUERRIER N'est-ce pas toi qu'on a chassé du temple et de la ville?
UN MARCHAND Les gardes du palais t'avaient pris, un matin, sous les fenêtres de la reine.
UN GUERRIER Pourquoi restes-tu en arrière?
(Le brahmane remonte les degrés sans répondre)
BADAL Donnez-moi l'ordre et mon cheval au galop me mettra avant eux aux portes de la ville.
LE BRAHMANE O frère de mon maître, me sera-t-il permis?
BADAL Que nous veux-tu?
LE BRAHMANE J'ai un message...
BADAL Un message?
LE BRAHMANE Je ne serais pas demeuré ici, sans ordre.
(Il salue longuement)
RATAN-SEN Qu'attends-tu pour parler?
LE BRAHMANE L'instant fixé par le destin.
BADAL (le poignard à la main) Parle. Ou meurs!
LE BRAHMANE Je suis Brahmane et j'appartiens au sultan des Mogols.
LE VEILLEUR Le sultan a dépassé les murs de la ville.
LE BRAHMANE Voici ce que dit le sultan : Pour gage d'amitié, il demande à son frère un seul joyau, Le joyau vivant qui est l'image du lotus céleste...
RATAN-SEN La reine!
LE BRAHMANE (menaçant) Si le présent lui est refusé, il viendra s'en saisir. Déjà son armée gronde à l'entour de la ville, comme une mer en furie.
RATAN-SEN Préparez mon armure! Faites sonner l'appel de guerre! Et toi, va répondre à ton maître que je t'aurais livré au bourreau si tu n'étais pas consacré aux dieux.
(Il se retire avec Badal)
GORA Alarme! Alarme!
(Il se retire)
LE VEILLEUR Alarme!
LA FOULE Alarme! Alarme!
UN GUERRIER C'est toi, brahmane, qui nous apportes la guerre?
(La foule entoure le brahmane)
LE BRAHMANE Ecartez-vous, profanes!
(défiant la foule et avec une exaltation croissante)
Victoire à Siva destructeur! La mort l'emporte sur la vie, La nuit a étouffé le jour Les guerriers seront égorgés dans la plaine, Les enfants pleureront dans l'épouvante, Les femmes hurleront sous la douleur, La cité où l'or répondait aux feux du soleil ne sera plus qu'un amas d'obscures décombres, La reine, pareille au lotus, montera sur le bûcher des veuves, Sa beauté sera réduite en fumée et en cendres, Pour avoir offensé les puissances du mal!
LA FOULE La reine! Il a maudit la reine! à mort! à mort!
(La foule se jette sur le brahmane qui disparaît dans le remous)
LE BRAHMANE (Il émerge un moment de la foule furieuse et apparaît le visage ruisselant de sang) La mort l'emporte! La mort! La mort!
(La foule se disperse, le brahmane reste étendu, mort)
Scène Quatrième
(Padmâvatî)
VOIX DERRIERE LA SCENE Aux armes! aux armes!
(Padmâvatî parait et s'avance sur la terrasse du palais)
PADMAVATI Il est trop tard... Je n'ai pu prévenir le sacrilège! Les dieux ne m écoutent plus. Quelle est donc mon offense? La place est déserte comme un rivage où la vague soudaine a passé Les hommes éprouvent le tranchant des épées, Et les femmes au fond des chambres se lamentent. Le premier meurtre est accompli, l'orage se déchaîne. J'avais livré ma vie à mon maître, et son désir était ma pensée. O dieux, je n'ai qu'une prière : ne me séparez pas de lui. Accordez-moi plutôt la mort. Vivre ou mourir auprès du maître est un égal bonheur.
ACTE DEUXIÈME
(Lintérieur du Temple de Siva, dans l'ombre. Au fond, la statue colossale du dieu. Dans le socle, l'accès d'une crypte. Portes à gauche et à droite, et au fond. En avant, à gauche, une dalle ensanglantée. En avant, à droite, un siège de marbre blanc)
Prélude
Scène Première
(Padmâvatî, puis les prêtres. Padmâvatî est appuyée à un piller, dans une attitude suppliante. Les Prêtres sont dans la crypte)
LES PRETRES Om! Siva, terreur des hommes et des dieux! Om! Siva, au corps de flamme, aux yeux de cendre!
PADMAVATI Siva, laisse ma voix se joindre à ces voix souterraines. Nos guerriers sont tombés comme la moisson que le fer tranche. Nous avons quitté le palais clair pour le refuge de ce temple funèbre, Avec les débris de l'armée Ratan-Sen tente un dernier effort. J'écoute au loin la rumeur du combat. Est-ce délivrance ou désastre?
(Padmâvatî se dissimule, les Prêtres sortent de la crypte en cortège)
LES PRETRES Siva, chasseur des existences, pourvoyeur de la mort! Om! Siva, nous avons dressé le bûcher sous tes pieds, abaisse tes regards et que jaillisse le Feu!
(Ils tournent autour de la dalle de gauche, puis du siège de droite, puis se prosternent devant la crypte)
PRETRES Sur la pierre sanglante, la Mort. Sur la pierre brillante, la Vie. Dans la nuit flamboyante, la Vie conduite par la Mort!
PADMAVATI (se rapprochant) Que dites-vous? Répondez! c'est votre reine.
(Les Prêtres sortent par le côté gauche, sans répondre. Seul, le dernier d'entre eux se détache)
UN PRETRE Nous avons vu sourire dans l'ombre la face terrible. Nous avons consulté les filles de Siva, les blanches, puis les noires. Elles ont promis, tour à tour, pour l'aurore, un sacrifice souverain.
PADMAVATI Quel sacrifice?
(librement)
Est-ce moi qui dois m'offrir?
(Tirant à demi un poignard de sa ceinture)
Vois, l'arme est prête.
UN PRETRE Il y aura plus d'une victime.
(Il sort)
PADMAVATI Plus d'une victime! Le silence est noir comme la tombe.
(Elle remet lentement le poignard au fourreau)
Scène Duxième
(Padmâvatî, Ratan-Sen)
RATAN-SEN (appelant) Padmâvatî!
(Il entre, il est ensanglanté)
PADMAVATI Vous! Seigneur! Blessé?
RATAN-SEN La dernière enceinte est tombée.
PADMAVATI Ma prière fut vaine!
RATAN-SEN Une trêve est accordée jusqu'à l'aurore.
PADMAVATI L'aurore!
RATAN-SEN Le sultan a fixé ce délai. Il vengera sur la cité entière le refus de son désir.
PADMAVATI Ce sont nos derniers instants sur cette terre.
(avec émotion)
O visage qui fit mon bonheur!
(Elle le contemple)
RATAN-SEN Padmâvatî!
PADMAVATI Douceur d'entendre cette voix encore!
RATAN-SEN Padmâvatî! La cité va périr.
PADMAVATI Nous mourrons avec elle!
RATAN-SEN Par notre faute!
PADMAVATI Par la volonté de Siva! Vous avez fait votre devoir.
RATAN-SEN Notre devoir est plus terrible.
PADMAVATI Retournez au combat pour une mort glorieuse.
RATAN-SEN Ce n'est pas la mort que je redoute.
PADMAVATI Je jure de monter avec vous sur le bûcher.
RATAN-SEN Padmâvati, du haut des terrasses, n'avez-vous pas entendu les cris des blessés, les râles des mourants? N'avez-vous pas vu le ciel s'ensanglanter des rougeurs d'incendie?
PADMAVATI Je saurai mourir.
RATAN-SEN Non! Il faut vivre.
PADMAVATI (presque à voix basse dans un sentiment d'effroi) Vous voulez me livrer!
RATAN-SEN (avec insistance) Padmâvatî! Songez aux mères qui verront leurs enfants égorgés! Songez aux femmes que leurs maris ne défendront plus. Songez aux jeunes filles dont le chant de noces sera la clameur d'agonie!
PADMAVATI (avec indignation) Me livrer vivante! Moi! votre épouse! O mon maître! Vous pouvez torturer ma chair par le fer ou par le feu, Vous pouvez priver de la lumière ces yeux où tant de fois vous avez lu mon amour. Mais vous ne pouvez pas faire que ces yeux supportent le regard d'un autre époux, Que cette chair subisse l'outrage des baisers du vainqueur.
RATAN-SEN L'aurore maudite est sur nous!
PADMAVATI Quand j'ai quitté Singhal et traversé la mer, votre peuple me reçut avec joie, Et j'ai vécu heureuse en vos palais. L'étreinte de mes bras n'a-t-elle pas scellé notre union éternelle? Et quand sur mon sein vous reposiez votre tête lasse, ô mon maître, avez-vous pu douter que le même soir funèbre nous verrait entrer tous deux dans le néant divin?
RATAN-SEN Padmâvatî, le soleil va bientôt reparaître et l'horreur du massacre se lever avec lui! J'ai promis à Siva de sauver mon peuple.
PADMAVATI Sacrilège! Par devant le feu pur du foyer, vous avez posévotre main sur mon cur et tracé sur mon front l'emblème de la possession. Celui qui brise un tel lien renaîtra bête immonde!
RATAN-SEN Je prends sur moi l'expiation!
PADMAVATI Je ne veux pas que votre âme se charge d'un tel crime.
RATAN-SEN (lui prenant la main) Vous me devez obéissance!
PADMAVATI (elle tire son poignard) Plutôt vous voir mort que coupable!
RATAN-SEN Venez!
PADMAVATI Protège-nous, Siva!
(Elle frappe de son arme Ratan-Sen qui chancelle)
RATAN-SEN Ah! Qu'avez-vous fait?
(Il tombe)
Où êtes-vous?
PADMAVATI (à genoux près de lui) Je ne vous quitte pas. La mort va nous unir.
(Il meurt. Elle se relève et court à la porte de gauche, puis à celle de droite)
A moi, prêtres, Les deux victimes vous attendant. Accourez, mes surs, pour la parure dernière.
Scène Troisième
(Padmâvatî, les prêtres, les femmes du palais, puis les Six Messagères de Siva, évoquées par les prêtres Les prêtres entrent par la porte de gauche, portent des torches qu'ils élèvent devant Padmâvatî. Elle incline la tête en silence. Puis, par la porte de droite, les femmes, voilées et tremblantes. Les prêtres portent le corps de Ratan-Sen vers la gauche. Les femmes s'empressent autour de Padmâvatî assise à droite)
PADMAVATI O mes soeurs fidèles, Ne pleurez pas sur moi, Rien ne m'est plus au monde. Mes yeux verront briller, sans crainte, à l'heure suprême, l'ardent regard de Kali.
(Deux par deux les femmes lui remettent le peigne, le miroir, le collier et le voile de noces)
Peigne qui tombas le premier soir, miroir qui unis nos images, Perles dont j'interrogeais la fuite caressante, voile où ma tendresse prit courage. Le soleil est mort. Seule dans la nuit obscure, j'écoute la voix confuse des étoiles. Mon âme m'abandonne.
(Les prêtres, ayant achevé la toilette funèbre, s'alignent au fond et commencent les incantations. Les femmes restent autour de Padmâvatî)
LES PRETRES Sur la pierre sanglante, la mort! Les filles blanches de Siva, Prithivi! Parvati! Ouma! Gaouri! Vous que le meurtre rassasie, Cherchez votre victime.
Pantomime
(Ils allument un feu dans un brasero au milieu de la scène,et jettent sur la flamme une poudre qui dégage une abondante fumée. Quand la fumée se dissipe, on voit paraître, se détachant du mur, quatre figures blanches, sortes de vampires qui s'avancent, rôdant flairant le sang. Elles découvrent le cadavre et en sont écartées par les prêtres. Les deux premières s'approchent davantage et tournent autour des prêtres, Repoussées, elles vont tomber dans le recoin à gauche. Les deux autres les imitent. Padmâvatî et les femmes détournent leurs regards)
LES PRETRES Sur la pierre brillante, la vie! Les filles noires de Siva! Kali, qui blesse de désir ! Dourga, serpent de la douceur perfide! Tentez l'épreuve!
Danse et pantomime
(Les prêtres jettent de nouveau la poudre surla flamme. Quand la fumée se dissipe, Kali s'est élancée de la crypte, agile, tenant un trident. Dourga s'avance, souple, donnant l'illusion du serpent. Kalientoure de gestes avides la danse onduleuse de Dourga. Dourga feint de chercher un refuge auprès des femmes. Toutes la repoussent Une se laisse fléchir. Dourga, glissant à ses pieds, l'enveloppe de ses braset la livre au trident de Kali. La femme s'abat, terrifiée. Les autres femmes se dispersent, poursuivies par Kali. Elles tombent et jonchent le sol. Alors, Kali et Dourga tournent autour de Padmâvatîen cercles de plus en plus serrés. Padmâvatî se lève, sur la défensive. Dourga veut envelopper les flancs de Padmâvatî, pendant que Kali s'approche. Mais Padmâvatî, avec un frisson d'horreur bondit de côté,les mains étendues en signe de conjuration. Kali et Dourga sont précipitées l'une sur l'autre et vont s'abattre dans le recoin à droite)
LES PRETRES Dans la nuit flamboyante, la vie conduite par la Mort! Filles blanches, Filles noires, douces, divines, apaisées, Répandez les fleurs des noces éternelles. Om bhour! Om bhouvah! On svah! Om mahah! Om djanah! Om toupas!Om satyram!
Céréminie Funébre
(Les quatre filles blanches et les deux filles noires reparaissent, transfigurées en Apsâras. Elles s'avancent portent des guirlandes et vont d'abord au corps du roi, puis à Padmâvatî. L'un et l'autre sont parés de fleurs. Padmâvatî est conduite par elles auprès de Ratan-Sen. Elle place la main sur son cur et de l'autre main fait un signe sur son front Les rites des noces funèbres s'accomplissent autour du feu qui brûle toujours. Cependant, au dehors, on entend des cris)
LES GUERRIERS (au dehors) Indraya! Indraya namah!
LES PRETRES L'aurore s'est montrée. Le carnage approche Délivrance! Délivrance!
(Le cortège se forme. Les prêtres d'abord, pontant le brasero allumé, disparaissent dans la crypte en chantant. La crypte s'éclaire de lueurs rouges, Les prêtres qui portent le corps du roi y entrent à leur tour)
LES PRETRES Siva! Quand paraît ton éclat, Le jour se change en nuit, les apparences s'évaporent! l'amour rentre dans le néant.
(Padmâvatî vient ensuite, conduite par les Apsâras. Le bûcher flamboie dans la crypte. A l'instant d'entrer, Padmâvatî a un mouvement d'effroi. Les Apsâras la soulèvent et la portent doucement.La porte du fond cède. Le sultan Alaouddin paraît vainqueur dans l'aube pâle. Les femmes jusque là prosternées à terre, se relèvent, cherchant à fuir. Alaouddin, arrêtant d'un geste ses soldats sur le seuil du temple,regarde, immobile, la fumée qui monte de la crypte. Le rideau tombe lentement)
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ACTO PRIMERO
(Una plaza en Chitor. Al fondo a la izquierda, el palacio del Rey precedido por una terraza)
Preludio
Escena Primera
(Gora, luego Badal, el vigía, ciudadanos, guerreros. Las jóvenes extienden alfombras en el suelo y adornan las imágenes sagradas con flores. Alegre animación)
EL VIGÍA ¡El sultán de los mogoles pasó por la tercera puerta!
(Hombres y mujeres corren asustados)
HOMBRES, MUJERES ¡Los mogoles! ¡Los mogoles!
UNA MUJER ¡Los mogoles en la ciudad! ¡Ay, qué desgracia!
UN GUERRERO (deteniéndolos) ¡Los mogoles son nuestros amigos!
(Gora va hacia el borde de la terraza)
GORA (dirigiéndose a la gente) ¡Guerreros, artesanos, mercaderes y vosotros, brahmanes, escuchad! Nuestro antiguo enemigo aparece hoy en Chitor sin amenazas y sin armas. Se convertirá bajo juramento en el hermano de nuestros hermanos, en el protector de nuestros hogares y en el vengador de nuestras injurias. Debemos ir a él con las manos extendidas y el corazón saltando de alegría, como la novia al regreso del novio.
UN GUERRERO ¡Los mongoles han maldecido a nuestra raza!
UN VENDEDOR ¡Desprecian a nuestros dioses!
UNA MUJER ¡Mataron a mi hijo!
UN ARTESANO Debemos regocijarnos pues esa es la orden.
EL VIGÍA ¡El sultán ha pasado por la cuarta puerta!
VOZ EN LA MULTITUD ¡Abran paso! ¡Abran paso al enviado del rey!
UN GUERRERO ¡Es el Príncipe Badal!
UN ARTESANO Viene de saludar al sultán extranjero.
UN VENDEDOR ¡Su caballo está blanco de espuma!
(Badal se baja del caballo)
UNA MUJER Su rostro, aun adolescente, se muestra muy serio.
GORA ¿Qué te dijo?
BADAL Palabras halagadoras. ¡Pero de pie, sobre mis estribos, pude ver como al borde de la llanura estaba todo su ejército!
GORA ¡Su ejército!
BADAL Vi como brillaban sus armas bajo el sol.
GORA ¡Oh, traición!
BADAL Y las aguas del río se veían negras...
GORA ¿Fueron los elefantes?
BADAL Sí, los elefantes de guerra al pasar.
GORA ¡Debemos advertir al Rey!
(Badal entra en el palacio)
EL VIGÍA ¡El sultán ha pasado por la quinta puerta!
UN COMERCIANTE ¡Démonos prisa!
UN GUERRERO ¡Se oye el fragor de los tambores!
UNA MUJER Extiende esta alfombra que es más suave que la hierba de los prados.
LAS DONCELLAS Prudente dios Ganesha, por favor, acepta estas flores. Estas rosas de la felicidad, estos lirios de la constancia, estos jazmines de la sabiduría, ¡que nunca se marchiten en nuestra ciudad!
VOZ EN LA MULTITUD ¡Aquí llegan! ¡Ya están aquí!
LOS GUARDIAS ¡Apartaos!
VOZ EN LA MULTITUD ¡Pasan sin mirar! ¡Sus rostros parecen máscaras doradas y el terror se esparce por doquier!
Escena Segunda
(Los anteriores, más Ratan-Sen, Alaouddin, los brahmanes, guerreros mongoles. Entrada de la procesión. Ratan-Sen sale del palacio, hablando en voz baja con Badal. Entrada de Alaouddin que avanza hacia Ratan-Sen)
ALAOUDDIN Soberano de un pueblo floreciente, que tu corazón se deleite siempre en las límpidas fuentes de la paz.
RATAN-SEN ¡Que la victoria ilumine siempre tu rostro!
ALAOUDDIN La blancura de tu ciudad, en la lejanía, se asemejaba a la luna en el horizonte.
RATAN-SEN El rumor de las batallas resuena en tus discursos.
ALAOUDDIN Sin embargo, si mis palabras supieran traducir mis pensamientos, serían más dulces que el canto del ruiseñor.
RATAN-SEN (presentándole la copa de la alianza) Esta es la copa de la prosperidad, los dioses residen en sus bordes, nuestras sangres unidas serán la ofrenda.
GORA (al brahmán) ¡Nadie debe permanecer aquí durante el rito de la alianza!
ALAOUDDIN Este brahmán es mi consejero, unirá sus oraciones a las vuestras. Pero ¿por qué tanta prisa? Dejadme admirar las maravillas de este lugar.
RATAN-SEN ¿Qué quieres ver? ¿Las flores de mis jardines y las fuentes, o bien en mi palacio las altas habitaciones donde, para mi descanso, aprisioné la eterna sombra de los bosques?
ALAOUDDIN Antes que la belleza de las piedras y de las estructuras, prefiero la belleza viviente.
RATAN-SEN La prontitud y el vigor de mis guerreros, ¿satisfarán tus expectativas?
ALAOUDDIN ¡Tú las superas!
Danza de los Guerreros (ballet)
ALAOUDDIN Al ver a estos guerreros saltar como tigres, ¿qué enemigo no temblaría? Pero un amigo está a tu lado y te pide un espectáculo más amable.
RATAN-SEN Mis bailarinas te lo darán.
Danza de las esclavas
ALAOUDDIN ¡Parecen pétalos de rosa girando, arrastrados por el viento! Pero ¡son esclavas extranjeras!
RATAN-SEN La danza está prohibida para las mujeres de nuestra pueblo...
ALAOUDDIN ... prohibido que bailen ante los infieles, peºro yo ya no soy un infiel, este brahmán lo puede testificar.
EL BRAHMÁN El señor Alaouddin, sultán de los mogoles, ha seguido mis consejos y ahora venera a nuestros dioses.
RATAN-SEN Nunca había sabido de una valentía unida a tanta previsión.
Ballet de las mujeres de palacio
ALAOUDDIN Estas son las mujeres del palacio; mi corazón está bañado en alegría. Sus cinturas son como lianas de oro; y sus ojos, bajo la sombra de sus pestañas, tienen el fulgor de las lámparas; y en sus pies llevan serpientes de hocicos dorados.
(Fin del baile. Las mujeres del palacio salen en procesión)
Adivino los nombres de estas bellezas: esta toma el suyo del cándido jazmín; esa otra de la perla centellante y aquella del plácido nenúfar. ¿Ninguna, sin embargo, está consagrada a la flor de la perfección divina? ¿A la flor del loto, la que vuestros sacerdotes llaman Padma?
RATAN-SEN Ninguna...
ALAOUDDIN ¿No hay una Padmavati?
RATAN-SEN ¿Qué pretendes decir?
ALAOUDDIN El oro se puede encerrar en el fondo de los cofres; el brillo de los diamantes no escapan de las bóvedas subterráneas; pero hay tesoros que esparcen su fragancia por todas partes, como flores en la oscuridad.
RATAN-SEN Padmavati, la princesa de Singhal, es mi legítima esposa.
ALAOUDDIN ¿Es ella indigna de su fama? Habla, brahmán: ¿me has engañado?
(Durante el canto del brahmán, Ratan-Sen delibera en voz baja con Gora y Badal, observado astutamente por Alaouddin. Ratan-Sen finalmente decide hacer entrar a Padmâvati. Badal va a dar las órdenes oportunas)
EL BRAHMÁN (con expresión apasionada y como alucinado) ¡Padmavati es la imagen viva del loto celestial! ¡Padmavati única, pura y soberana! Ella irradia un perfume tan dulce que la envuelve el murmullo de abejas invisibles. Su cuerpo está rodeado de luminosidad. Padmavati es la suave brisa de los mares donde flota la tierra. Sus ojos son las estrellas del cielo de los inmortales. Ella se desliza por el aire igual que un cisne sobre el agua inmóvil de los lagos. Las flores nacen de su sonrisa. Padmavati es el sueño del que despertó el creador de los mundos; su rostro es el amanecer del Nirvana. Hacia ella se precipitan los deseos del universo muriendo ente su presencia. Su voz es el canto del olvido.
(A una señal de Ratan-Sen, Badal entra en el palacio)
Escena Tercera
(Los anteriores, Padmavati y Nakamti. Padmavati aparece en un balcón del palacio)
NAKAMTI (separándose del grupo de doncellas) Se eleva en el cielo donde sueña la primavera, dominando la tierra oscura con su frente deslumbrante ahuyenta la noche. Y la flor despierta, y el pájaro por ella exhala su canto, y el bosque por ella emite largos sollozos.
VOZ EN LA MULTITUD Padmavati, ¡oh, reina! Padmavati, que Shiva te sea favorable, que Lakshmi conserve tu belleza, ¡oh, hija del reino de Singhal! ¡Oh reina Padmavati, que los dioses te protejan!
NAKAMTI ¡Oh, Padmavati! ¡Oh, reina de nuestras noches! Ten piedad de nosotros y dígnate mirarnos con tu dulce mirada.
ALAOUDDIN ¡El velo! ¡Que se quite el velo!
(Ratan-Sen le hace una seña a Padmavati para que se quite el velo. Ella obedece caminando con desdén, mientras la gente se postra ante un gesto de Gora. Alaouddin se levanta como atraído y se deja caer en su asiento, abrumado. El brahmán se le acerca)
No puedo creerlo; ella ha pasado; me parece estar expirando... ¡La noche ha pasado sobre mis ojos!
EL BRAHMÁN ¡Señor, debemos irnos!
GORA ¿Y la alianza?
EL BRAHMÁN El pacto es falaz cuando el corazón está turbado.
RATAN-SEN ¿A mi hermano le queda un deseo que yo pueda cumplir?
ALAOUDDIN Estoy abrumado por los remordimientos, la felicidad y la gratitud. Mañana regresaré, dueño de mí mismo, y mi escolta traerá regalos dignos de vuestros merecimientos.
(Alaouddin desciende de la terraza del palacio apoyándose en el hombro del brahmán mientras los guardias hacen retroceder a la multitud)
VOZ EN LA MULTITUD ¡Huyen, huyen como ladrones!
(Un guerrero se desprende de la multitud y se dirige al Brahmán que se ha quedado al pie de los escalones)
UN GUERRERO ¿Quién eres, brahmán?
UN ARTESANO Creo que te vi en Chitor.
UN GUERRERO ¿No fuiste expulsado del templo y de la ciudad?
UN VENDEDOR ¡Los guardias de palacio te sacaron una mañana de debajo de las ventanas de la reina!
UN GUERRERO ¿Por qué te quedas atrás?
(El Brahmán sube los escalones sin contestar)
BADAL Dadme la orden y mi caballo galopará hasta las puertas de la ciudad.
EL BRAHMÁN ¡Oh, hermano de mi Señor! ¿Me permites?
BADAL ¿Qué quieres de nosotros?
EL BRAHMÁN Tengo un mensaje...
BADAL ¿Un mensaje?
EL BRAHMÁN No me hubiera quedado aquí sin órdenes.
(Saluda profundamente)
RATAN-SEN ¿Qué esperas para hablar?
EL BRAHMÁN El momento marcado por el destino.
BADAL (empuñando una daga) ¡Habla, o morirás!
EL BRAHMÁN Soy brahmán y mensajero del sultán de los mogoles.
EL VIGÍA ¡El sultán traspasó las murallas de la ciudad!
EL BRAHMÁN Esto es lo que dice el sultán: Como pacto de amistad, le pide a su hermano una sola joya, la joya viva que es la imagen del loto celestial...
RATAN-SEN ¡La reina!
EL BRAHMÁN (amenazante) Si se le niega dicho presente, vendrá a apoderarse de él por la fuerza. Su ejército ya ruge alrededor de la ciudad, como un mar embravecido.
RATAN-SEN ¡Preparad mi armadura! ¡Que suene la llamada a la guerra! Y tú, ve a decirle a tu amo que te habría entregado al verdugo si no estuvieras consagrado a los dioses.
(Se retira con Badal)
GORA ¡A las armas! ¡A las armas!
(Se retira)
EL VIGÍA ¡A las armas!
LA MULTITUD ¡A las armas! ¡A las armas!
UN GUERRERO ¿Eres tú, brahmán, quien nos trae la guerra?
(La multitud rodea al brahmán)
EL BRAHMÁN ¡Apartaos, profanos!
(desafiando a la multitud y con creciente exaltación)
¡Victoria para Shiva el destructor! ¡La muerte prevalece sobre la vida y la noche ha sofocado al día! Los guerreros serán degollados en la llanura; los niños llorarán de terror; las mujeres gritarán de dolor; la ciudad dorada será un montón de escombros oscuros; la reina, como una flor de loto, subirá a la pira de las viudas y su belleza se reducirá a humo y cenizas, ¡por haber ofendido a los poderes del mal!
LA MULTITUD ¡La reina! ¡Ha maldecido a la reina! ¡Matadlo! ¡Matadlo!
(La multitud se arroja sobre el brahmán que desaparece en el remolino)
EL BRAHMÁN (emerge entre la multitud por un momento con la cara sangrante) ¡La muerte gana! ¡La muerte! ¡La muerte!
(La multitud se dispersa, dejando ver el cadáver del brahmán)
Escena Cuarta
(Padmavati)
UNA VOZ DETRÁS DEL ESCENARIO ¡A las armas! ¡a las armas!
(Padmavati aparece y avanza sobre la terraza del palacio)
PADMAVATI ¡Es demasiado tarde!... ¡No pude evitar el sacrilegio! Los dioses ya no me escuchan. ¿Cuál es mi delito? La plaza está desierta como la playa arrasada por una ola repentina... Los hombres afilan las hojas de sus espadas y las mujeres lloran en el interior de sus hogares. Se ha consumado el primer asesinato, ya se desata la tormenta. Había entregado mi vida a mi señor y su deseo era mi pensamiento. ¡Oh dioses, solo tengo una oración: no me separéis de él! ¡Concededme la muerte en su lugar! Vivir o morir con mi señor es igualmente dichoso.
ACTO SEGUNDO
(El interior del Templo de Shiva, entre sombras. Al fondo, la colosal estatua del dios. En la base, acceso a una cripta. Puertas a ambos lados y al fondo. Delante, a la izquierda, una losa ensangrentada. Al frente, a la derecha, un sitial de mármol blanco)
Preludio
Escena Primera
(Padmavati, luego los sacerdotes. Padmavati se apoya en un pilar, en actitud suplicante. Los sacerdotes están en la cripta)
SACERDOTES ¡Om! ¡Shiva, terror de hombres y dioses! ¡Om! ¡Shiva, cuerpo de llama, ojos de ceniza!
PADMAVATI ¡Shiva, permite que mi voz se una a esas voces subterráneas! Nuestros guerreros han caído como mieses cortadas por la guadaña. Haciendo un último esfuerzo, los restos del ejército de Ratan-Sen abandonaron el luminoso palacio para refugiarse en este templo funerario. Se oye a lo lejos el rumor del combate... ¿Será la liberación o el desastre?
(Padmavati se oculta, los sacerdotes salen de la cripta en procesión)
SACERDOTES ¡Shiva, cazador de existencias, proveedor de la muerte! ¡Om! ¡Shiva, hemos erigido la pira bajo tus pies, baja tu mirada y deja que el fuego brote!
(Forman un círculo alrededor de la losa a la izquierda, luego se inclinan ante la cripta)
SACERDOTES Sobre la piedra ensangrentada, ¡la muerte! Sobre la piedra brillante, ¡la vida! En la noche resplandeciente, ¡la vida conducida por la muerte!
PADMAVATI (acercándose) ¿Qué decís? ¡Responded! Soy vuestra reina.
(Los Sacerdotes salen por el lado izquierdo, sin contestar. Solo el último de ellos se aparta)
UN SACERDOTE Vimos el terrible rostro sonriendo entre las sombras. Consultamos a las hijas de Shiva, primero a las blancas, luego a las negras. Ellas prometieron, por su parte, hacer un soberano sacrificio al amanecer.
PADMAVATI ¿Qué sacrificio?
(con franqueza)
¿Tengo que ofrecerme?
(Desenvaina hasta la mitad una daga de su cinturón)
Ved, el arma está lista.
UN SACERDOTE Habrá más de una víctima.
(sale)
PADMAVATI ¡Más de una víctima! El silencio es negro como la tumba.
(Lentamente vuelve enfundar la daga en la vaina)
Escena Segunda
(Padmavati, Ratan-Sen)
RATAN-SEN (Llamando) ¡Padmavati!
(Entra, ensangrentado)
PADMAVATI ¡Tú! ¡Señor! ¿Herido?
RATAN-SEN Cayó la última defensa.
PADMAVATI ¡Mi oración fue en vano!
RATAN-SEN Nos concedieron una tregua hasta el amanecer.
PADMAVATI ¿Hasta el amanecer?
RATAN-SEN El sultán fijó ese plazo. Se vengará destruyendo toda la ciudad si no cumplo con su deseo.
PADMAVATI Estos son nuestros últimos momentos en la tierra.
(con emoción)
¡Oh, tu rostro me transmite felicidad!
(Ella lo contempla)
RATAN-SEN ¡Padmâvatî!
PADMAVATI ¡Es dulce escuchar tu voz de nuevo!
RATAN-SEN ¡Padmavati! La ciudad perecerá.
PADMAVATI ¡Moriremos con ella!
RATAN-SEN ¡Por nuestra culpa!
PADMAVATI ¡Por la voluntad de Shiva! Tú has cumplido con tu deber.
RATAN-SEN Nuestro deber es más terrible.
PADMAVATI Regresa al combate para morir como un héroe.
RATAN-SEN No es la muerte lo que temo.
PADMAVATI Juro subir contigo a la hoguera.
RATAN-SEN Padmavati, desde lo alto de las terrazas, ¿no escuchaste los gritos de los heridos y los lamentos de los moribundos? ¿No has visto el cielo ensangrentado con el rojo del incendio?
PADMAVATI Sabré morir.
RATAN-SEN ¡No, debemos vivir!
PADMAVATI (en voz baja, con una sensación de temor) ¿Quieres entregarme?
RATAN-SEN (con insistencia) ¡Padmavati! Piensa en las madres que verán masacrados a sus hijos. Piensa en las mujeres cuyos maridos ya no las defenderán. Piensa en las doncellas cuyo canto nupcial será el clamor de la agonía.
PADMAVATI (con indignación) ¡Entregarme viva! ¡A mí! ¡A tu esposa! ¡Oh, mi señor! Puedes martirizar mi carne con hierro o con fuego, puedes quitar la luz a estos ojos donde tantas veces leíste mi amor, pero no podrás hacer que esos ojos soporten la mirada de otro esposo, ni que mi carne sufra el ultraje de los besos del conquistador.
RATAN-SEN ¡El maldito amanecer ya está sobre nosotros!
PADMAVATI Cuando salí del reino de Singhal y crucé el mar, tu pueblo me recibió con alegría y viví feliz en tus palacios. ¿Acaso mis abrazos no sellaron nuestra unión eterna? Y cuando sobre mi pecho apoyaste tu cabeza cansada, ¡oh, mi señor! ¿pudiste dudar que la misma noche fúnebre nos vería a ambos entrar en el vacío divino?
RATAN-SEN ¡Padmavati, el sol pronto reaparecerá y el horror de la masacre llegará con él! Le prometí a Shiva que salvaría a mi pueblo.
PADMAVATI ¡Sacrilegio! Frente al fuego sagrado del hogar, pusiste tu mano sobre mi corazón y trazaste sobre mi frente el signo de la posesión. ¡Quien rompa tal vínculo renacerá como una bestia inmunda!
RATAN-SEN ¡Tomo sobre mí la expiación!
PADMAVATI No quiero que tu alma cargue con semejante pecado.
RATAN-SEN (tomando su mano) ¡Me debes obediencia!
PADMAVATI (ella saca su daga) ¡Prefiero verte muerto que culpable!
RATAN-SEN ¡Ven!
PADMAVATI ¡Protégenos, Shiva!
(Apuñala a Ratan-Sen que se tambalea)
RATAN-SEN ¡Ay! ¿Qué hiciste?
(Él cae)
¿Dónde estás?
PADMAVATI (arrodillándose a su lado) No te estoy dejando, la muerte nos unirá.
(él muere. Ella se levanta y corre hacia la puerta de la izquierda, luego hacia la de la derecha)
¡Sacerdotes venid, dos víctimas os esperan! ¡Apresuraos, hermanas mías, a cumplir el rito final!
Escena Tercera
(Padmavati, los sacerdotes, las damas del palacio, luego los Seis Mensajeros de Shiva, convocados por los sacerdotes que entran por la puerta de la izquierda. Padmavati se inclina en silencio. Luego entran las mujeres, cubiertas con velos. Los sacerdotes llevan el cuerpo de Ratan-Sen hacia la izquierda. Las mujeres se agolpan alrededor dePadmavati)
PADMAVATI ¡Oh, mis fieles hermanas, no lloréis por mí, ya nada me queda en el mundo! Mis ojos verán, sin temor, brillar en la hora suprema, la mirada ardiente de la diosa Kali.
(De dos en dos, las mujeres le entregan la peineta, el espejo, el collar de perlas y el velo de novia)
Peineta que cayó en la primera noche; espejo que unió nuestras imágenes; perlas cuyo vuelo acariciante interrogué; velo con que mi ternura se animó. El sol está muerto. En la noche oscura, escucho la voz confusa de las estrellas. Mi alma me abandona.
(Los sacerdotes, habiendo terminado el baño ritual, se alinean en el fondo y comienzan los conjuros. Las mujeres permanecen alrededor de Padmavati)
SACERDOTES ¡Sobre la piedra ensangrentada, la muerte! Las blancas hijas de Shiva, ¡Prithivi! ¡Parvati! ¡Ouma! ¡Gauri! Vosotras que os sacias con la muerte, buscad a vuestra víctima.
Pantomima
(Encienden fuego en un brasero y echan sobre las llamas un polvo que despide abundante humo. Cuando el humo se disipa, vemos aparecer, desprendiéndose de la pared, cuatro figuras blancas, que como vampiros avanzan olfateando sangre. Descubren el cadáver y son ahuyentadas por los sacerdotes. Las dos primeras se acercan más y giran alrededor de los sacerdotes. Empujadas hacia atrás, caerán a un lado. Las otras dos las imitan. Padmavati y las mujeres miran hacia otro lado)
SACERDOTES ¡Sobre la piedra brillante, la vida! ¡Las hijas negras de Shiva! ¡Kali, que hiere con el deseo! ¡Durga, la serpiente de pérfida dulzura! ¡Realizad la prueba!
Danza y pantomima
(Los sacerdotes vuelven a arrojar polvo sobre las llamas. Cuando el humo se disipa, la diosa Kali ha salido de la cripta, sosteniendo un tridente. La diosa Durga avanza, sinuosamente, provocando la ilusión de ser una serpiente. Kali circunda a la ondulante de Durga con ávidos gestos. Durga finge buscar refugio entre las mujeres. Todas la rechazan, pero una se deja atrapar. Durga, deslizándose a sus pies, la rodea con sus brazos y la entrega al tridente de Kali. La mujer se desploma, aterrorizada. Las otras mujeres se dispersan, perseguidas por Kali. Entonces Kali y Durga giran alrededor de Padmâvatî en círculos cada vez más estrechos. Padmâvatî se levanta, a la defensiva. Durga quiere rodear a Padmâvatî, mientras Kali se acerca, pero Padmâvatî, con un estremecimiento de terror, salta a un lado, con las manos extendidas en señal de conjuro. Kali y Durga se abalanzan una sobre la otra y caen rodando)
SACERDOTES En la noche resplandeciente, ¡la vida es conducida por la muerte! Hijas blancas, hijas negras, dulces, divinas, pacíficas, ¡esparcid las flores de las bodas eternas! ¡Om bhora! ¡Om bhuvah! ¡On svah! ¡Oh maha! ¡Om djanah! ¡Om tupas! ¡Om satiram!
Ceremonia fúnebre
(Reaparecen las cuatro figuras blancas y las dos figuras negras, transfiguradas en Apsaras. Se adelantan con guirnaldas y van al cuerpo del rey, luego a Padmavati. Ambos quedan adornados con flores. Padmavati es conducida junto a Ratan-Sen. Ella se lleva una mano al corazón y con la otra mano hace un signo sobre la frente. Los ritos de las bodas fúnebres se cumplen alrededor del fuego que aún arde. Mientras tanto, afuera, se escuchan gritos)
LOS GUERREROS (desde el exterior) ¡Indraya! ¡Indraya namah!
SACERDOTES ¡Ha aparecido el alba! ¡La masacre acerca la liberación! ¡Liberación!
(Se forma la procesión. Primero los sacerdotes, pasan sobre el brasero encendido y desaparecen cantando en la cripta que se ilumina con luces rojas; luego entran los sacerdotes que transportan el cuerpo del rey)
SACERDOTES ¡Shiva, cuando aparece tu resplandor, el día se convierte en noche! ¡Las apariencias se desvanecen y el amor cae en la nada!
(Padmavati entra a continuación, conducida por las Apsaras. La pira arde dentro de la cripta. En el momento de entrar, Padmavati hace un gesto de terror. Las Apsaras la levantan y la sostienen. La puerta del fondo cede. El sultán Alaouddin aparece victorioso a la luz del pálido amanecer. Las mujeres, hasta entonces postradas en el suelo, se levantan tratando de huir. Alaouddin, deteniendo a sus soldados con un gesto en el umbral del templo, observa, inmóvil, el humo que sale de la cripta. El telón cae lentamente)
Digitalizado y traducido por: José Luis Roviaro 2022 |