EL REY DE YS

 

 

 

Personajes

 

EL REY

MARGARED

ROZENN

MYLIO

KARNAC

SAN CORENTIN

JAHEL

                                 Rey de Ys   

                 Hija del Rey enamorada de Mylio


                 Hija del Rey enamorada de Mylio

                   Noble, enamorado de Rozenn
 
             Príncipe enemigo, enamorado de Margared


               
              Santo Patrono de Ys


                       Mayordomo del Palacio de Ys

                          Bajo

           Mezzosoprano


                    Soprano

                        Tenor

                    Barítono

                          Bajo


                       
Tenor

 

 

 

La acción se desarrolla en la ciudad de Ys, Bretaña, Francia, en época legendaria.

 

 

ACTE 1


Ouverture

(Une terrasse du palais des rois d'Ys. A gauche les
jardins. A droite l'entrée du palais au vaste escalier
de granit. A l'horizon, la mer. Scène populaire)

CHOEUR GÉNÉRAL
Noël! C'est l'aurore bénie,
C'est l'heure de joyeux émoi!
Toute crainte est bannie,
Aux jours meilleurs nous avons foi.

Que l'antique cité s'éveille rajeunie
Pour acclamer la fille de nos rois!
Cette enfant par ses charmes
Enchaîne un rival jaloux;

Vaincu par ses regards
plus puissants que nos armes,
Nous le verrons tomber à ses genoux.
Oublions nos alarmes,
L'amour a triomphé pour nous.

Déployons les bannières;
Parons le seuil de nos maisons;
De la paix messagères,
Cloches. sonnez à tous les horizons!

JAHEL
Oui, peuple, voici l'heure où le roi, notre sire,
Au front de son enfant met la couronne d'or;
Où le prince Karnac aux autels va conduire
La belle Margared, la perle de l'Armor

LE CHOEUR
Noël!

JAHEL
Pour cet heureux hymen,
Pour la paix qu'il nous donne,
Saint Corentin, gardien de la terre bretonne,
Nous prêta son concours!

LE CHŒUR
Qu'il nous protège toujours!

CHŒUR DES FEMMES
Les guerres sont terminées,
Voici pour nous décornais
Les tranquilles destinées,
Les doux travaux de la paix!

Les glaives sur la muraille
Vont reposer pour toujours
Et les chants de bataille
Font place au chant des amours

LE CHŒUR
Noël!
Voici pour nous désormais
Les tranquilles destinées!
Noël!

Quand les rois ont la jeunesse
Les peuples ont les plaisirs!

(Appel de trompettes au dehors).

JAHEL
Entendez­vous ce signal ? A l'horizon se montre
Déjà notre hôte glorieux!

LE CHOEUR
C'est lui, c'est notre maître,
Portons­lui nos vœux!
Bientôt il va paraître!
Qu'il nous rende heureux!
Noël!

Chantons, foule enivrée!
Fêtons tous son entrée!
Noël!

Gloire à notre maître!
Bientôt il va paraître!
Allons à sa rencontre
Lui porter nos vœux!

Chantons, foule enivrée,
Qu'il nous rende heureux!

(Les chants se perdent au loin. Les princesses Rozenn
et Margared paraissent au haut de l'escalier, elles
descendent lentement en scène. Rozenn observe
Margared dont l'attitude trahit de sombres pensées)

ROZENN
Margared, ô ma sœur!
Quand chaque front rayonne,
Le tien est pâle et dans tes yeux
Brille une sombre flamme,
et cette main frissonne.

(Margared retire sa main que
Rozenn venait de prendre.)

MARGARED
Rozenn ! Que dis­tu donc ?
non, mon cœur est joyeux.

Eh quoi! partout sur ma route
Se lève un peuple enchanté!
Un prince que l'on redoute
Par mes charmes est dompté!

J'ai la puissance royale,
J'ai le sceptre des aïeux,
Et tu dis que je suis pâle,
Tu vois la fièvre en mes yeux!

Si mon regard s'illumine,
C'est devant tant de splendeur,
Et mon front ne s'incline
Que sous le poids du bonheur!

ROZENN
(à part)
Ah ! sous ce cri d’orgueil
un sanglot se devine!

(à Margared)

En silence pourquoi souffrir?
Dans mon cœur épanche ta peine!
Que la moitié m'en appartienne
Si je ne sais pas la guérir!

On voit sous la fraîche rosée
Se relever le lis tremblant.
Parfois une larme en coulant
Fait aussi notre âme apaisée.

MARGARED
Je n'ai pas à pleurer tout bas;
Et ta pitié, je ne la comprends pas.

En silence je veux souffrir,
Et ta douce parole est vaine.
Pourquoi conter une peine
Que tu ne saurais pas guérir ?

ROZENN
Pour terminer une sanglante guerre,
Au prince Karnac notre père t'a promise.
Aurais­tu regret de cet hymen?

MARGARED
(sombre et résignée)
Je fais mon devoir sans faiblesse,
Et n'ai pas aujourd'hui, d'ailleurs, plus de tristesse
Que je n'en eus hier!
Et n'en aurai demain!

ROZENN
Alors pourquoi sur ton visage
Ces chagrins amers que i ai lus ?

MARGARED
(ne se contenant plus)
C'est qu'en moi, je porte l'image
D'un autre que j'aimais!

ROUEN
D'un autre ?

MARGARED
(sombre)
Et qui n'est plus!

ROZENN
(à Margared)
C'est autre, Margared, peut­être accompagnait
Mylio, notre ami d'enfance,
Mylio qui partit naguère et pour toujours ?...

MARGARED
(avec passion et désespoir)
Ah ! tu viens de le dire!
Oui, le même navire
Qui portait Mylio m'emportait mes amours!

(Entrent les dames d'honneur et les suivantes de
Margared, elles viennent l'habiller pour la cérémonie
nuptiale. Rozenn entraîne sa soeur dans le coin gauche
près de la rampe, s'efforce de calmer son agitation et
se place devant elle, afin que les suivantes ne
s'aperçoivent pas du désespoir de Margared.)

LE CHOEUR
Venez, l'heure presse!
Devez­vous, Princesse
Tarder un instant ?
L'attente est cruelle
Quand elle est si belle,
Celle qu'on attend.
Laissez vos femmes empressées
Sur votre front mettre à la fois
Le voile blanc des fiancées
Et la couronne de nos rois.

MARGARED
(à Rozenn)
Un époux... détesté...
va m'attendre à l'autel!
Je devrai... lui jurer... un serment éternel!

ROZENN
O ma sœur! je comprends ta douleur!

MARGARED
Chère Rozenn, comprends­tu maintenant ?

ROZENN
Ah! pourquoi n'as­tu pas rejeté
Cet hymen odieux par ton coeur redouté ?

MARGARED
Hélas! Je suis la rançon de la guerre.

ROZENN
N'accuse pas notre père!

(Les femmes viennent entourer Margared
qui se laisse emmener)

ROZENN
(seule)
Vainement j'ai parlé de l'absence éternelle
Et de l'avenir sans espoir!
Non! non! je n'y crois pas!...
je t'attends, je t'appelle!
O Mylio! je sens que je dois te revoir.

Par une chaîne trop forte
Tous deux nous étions unis.
Puisque je ne suis pas morte,
Tes jours ne sont pas finis.

Si celui que je réclame
N'était plus, ô vastes cieux,
Vous n'auriez pas tant de flamme
Et tant d'azur pour mes yeux!

O mer profonde et sereine!
Pourrais­tu sourire encor,
Si tu n'étais pas certaine
De me rendre mon trésor ?

Quand tu remplis à chaque heure
Mon rêve ou mon souvenir,
Une voix intérieure
Me dit que tu vas venir.

MYLIO
(arrivé derrière Rozenn)
Si le ciel est plein de flammes,
O Rozenn! c'est qu'il sait bien
Qu'à l'heure où tu me réclames
Mon coeur tremble près du tien.

(Rozenn, immobile, frémissante, écoute, comme
en un songe, sans oser se retourner.)

ROZENN
Cette voix! est­ce un rêve ?

MYLIO
O Rozenn! mon cœur tremble près du tien!

(Rozenn se retourne et se jette dans
les bras de Mylio.)

ROZENN
Mylio! Mylio!
cette joie est possible!

MYLIO
C'est moi! C'est ton amant!
Le Seigneur à ta voix ne fut pas insensible !

ROZENN
Le Seigneur est clément!

MYLIO
Le Seigneur est clément!

ROZENN
On te disait perdu sur de lointaines plages,
Vaincu par le destin plus fort que ton courage.

MYLIO
J'étais captif avec mes compagnons;
C'est vainqueurs maintenant
que nous vous revenons!

ROZENN
Le bonheur est si grand
que j'ose à peine y croire!
S'il allait se briser!...

(Elle tressaille en entendant les trompettes.)

ROZENN
Voici le prince et son cortège.

MYLIO
Le prince?

ROZENN
C'est l'époux par ma sœur accepté!

MYLIO
Je vais rendre la liberté
Aux amis qui, jaloux de mon doux privilège,
Veulent aussi revoir leurs toits et leurs amours!

ROZENN
Quand vous verrai­je ?

MYLIO
Ce soir... demain... toujours.

(Mylio s'éloigne Rozenn reste un instant rêveuse
et sort lentement. Le roi paraît au haut de
l'escalier conduisant Margared en mariée et suivi
de toute la cour. Par le fond entrent Karnac et ses
guerriers suivis de tout le peuple d'Ys.)

KARNAC
(au Roi)
Désireux d'accomplir l'union résolue,
Oubliant les débats qui nous armaient jadis,
Roi de la ville d'Ys,
Le Prince Karnac te salue!

LE ROI
Dans un rival je trouve un fils!
Soit béni le destin qui t'ouvre ma demeure!

(Se tournant vers le peuple.)

Et vous tous, écoutez ma parole à cette heure!

(La foule s'approche.)

Aux jours futurs j'ai dû songer,
tant déjà glacé par l'âge.
Que ma mort soit un deuil et non pas un danger!
Nos enfants ne pourront vous aimer davantage,
Ils sauront mieux vous protéger.
Bras vaillant, beauté sereine
Font le pouvoir puissant et doux:
Margared, vous serez leur reine!
Karnac, vous serez son époux!

LE CHOEUR
Nous voulons ici leur promettre
Obéissance à l'avenir!
O Roi, nous acceptons Karnac
pour notre maître.
Aux autels du Seigneur nous allons les bénir!

(Pendant la présentation, Rozenn s'est approchée
de Margared, l'a prise par la main, et l'a menée
hors des groupes sur le devant de la scène; elle
lui dit quelques mots tout bas d'une façon
animée.)

MARGARED
Quoi! Mylio vivant! Par quel prodige ?

ROZENN
Il m'a parlé, te dis­je!

MARGARED
(à part)
Jour maudit!

ROZENN
(avec tendresse)
Comme lui, l'ami que tu pleurais
Parmi nous reviendra!

MARGARED
(à part)
Lui vivant! et j'irais
Me lier à Karnac d'une chaîne éternelle!

(Le Roi revient vers Margared et
lui prend la main.)

LE ROI
Venez, ma fille, venez à la chapelle!

MARGARED
(avec éclat)
Non, mon père, jamais!

LE CHOEUR
Qu'a­t­elle dit ? Grands Dieux!

MARGARED
Je vous dis d'oublier la promesse donnée:
Car je repousse un hyménée
Hier indifférent, maintenant odieux!

LE PEUPLE D'YS
O criminelle démence!
De cette mortelle offense
Karnac voudra se venger.
Si la guerre est rallumée
Hélas! contre son armée
Qui pourra nous protéger ?

GUERRIERS DE KARNAC
De cette mortelle offense
Karnac saura se venger,
Tremblez. tremblez!

KARNAC
Tremblez! Tremblez!

LE ROI
O criminelle démence!

MARGARED
Que m'importe le danger ?

ROZENN
Faut­il perdre l'espérance ?

TOUS
C'est Mylio!

KARNAC
O Roi! c'est maintenant une guerre sans trêve,
Un combat sans merci!
Voici mon gant!

(Karnac jette son gantelet. Mylio, caché jusqu'à
ce moment dans la foule, s'avance rapidement)

MYLIO
Je le relève!

(La foule s'écarte et laisse voir
au fond les soldats de Mylio.)

TOUS
C'est Mylio!

MARGARED, ROZENN
Mylio!

MYLIO
Oui, nous venons ici
Pour combattre avec vous!

TOUS
C'est Mylio!

KARNAC
(avec dédain)
Toi qui parles ainsi,
As­tu donc pour la mort une ardeur si jalouse?
Par elle méprisé, tu la cherches toujours.

MYLIO
Non, c'est toi qu'elle attend,
toi qui veux une épouse,
Et ton lit nuptial est au pied de ces tours!

LE PEUPLE D'YS
Vive Mylio! Gloire à Mylio!

KARNAC ET SES SOLDATS
Tremblez, tremblez! Mort à Mylio!

(Le peuple d'Ys veut se ruer sur Karnac; le Roi et Mylio se 
jettent entre les deux groupes. Karnac et ses soldats sortent 
en menaçant.)



ACTE II


Scène 1

(Une grande salle du Palais d'Ys, Margared,
debout prés d'une fenêtre, regarde la campagne)

MARGARED
De tous côtés j'aperçois dans la plaine
Les soldats par Karnac sous nos murs amenés.
O Mylio, si la lutte est prochaine,
De plus rudes combats en moi sont déchaînés.

Lorsque je t'ai vu soudain reparaître
Vivant et superbe ainsi qu'autrefois,
Mon cœur aussitôt s'est pris à renaître
Au feu de tes yeux, au son de ta voix;

Sans m'inquiéter de ceux que je blesse
Au­devant de toi j'ai voulu courir
Et l'emportement de ma folle ivresse
A tout renié pour te conquérir!

Hélas! chaque jour qu'en pleurant je compte,
Est venu venger l'oubli du devoir,
Mettant à mon front un peu plus de honte,
Laissant à mon âme un peu moins d'espoir.

C'est Rozenn, je le sens,
qu'il aime et qu'il admire.
Oui! c'est elle qui reçoit
Les doux aveux qu'il soupire.

Et si je le vois sourire
C'est qu'il l’aperçoit!
J'espère encor pourtant,
si grande est ma démence!
Quand je serai sans espérance,
Vous qui m'aurez frappée,
implorez le destin!
L'amour que rien ne lasse
En ce jour fera place
A la haine que rien n'éteint!

(Le roi, Rozenn et Mylio paraissent.
Margared se dissimule)

LE ROI
(à Mylio)
Que demain au lever de l'aurore
La bataille s'engage.
Allez donc sans retard
Rejoindre nos soldats.

ROZENN
O mon père, ce départ...
Ce combat... c'est odieux!

MYLIO
(avec tendresse)
Pourquoi trembler encore ?

(Calme et grave)

Sur l'autel de Saint Corentin,
Le protecteur de la Bretagne,
Pour que sa grâce m'accompagne,
Plein d'une ardente foi j'ai prié ce matin,
Et soudain j'ai cru voir que l'image sacrée
S'animait... Une voix d'en haut a murmuré
« Mon fils, marche au combat
d'une âme rassurée;
Je veille sur mon peuple et je le défendrai ! »

Oui, je le sens, je l'atteste,
Le salut nous est promis,
C'est à nos seuls ennemis
Que ce jour sera funeste!

Sans en garder le souci,
Nous pouvons compter leur nombre;
Pour les rejeter dans l'ombre,
Le Seigneur les compte aussi.

C'est lui qui, pour les abattre
Va seconder nos efforts!
Qui sait prier sait combattre
Et les croyants sont les forts!

MARGARED
(cachée)
Hélas! Pourrais­je, en mes alarmes,
Prier comme autrefois ?
O ciel! Je ne te vois
Qu'au travers de mes larmes!

LE ROI, MYLIO, ROZENN
Le ciel saura bénir nos armes
Le salut nous est promis!
C'est à nos seuls ennemis
Que ce jour sera funeste!

Sans en garder le souci,
Nous pouvons compter leur nombre!
Pour les rejeter dans l'ombre,
Le Seigneur les compte aussi!

C'est lui qui, pour les abattre!
Va seconder nos efforts!
Qui sait prier sait combattre!
Et les croyants sont les forts!

MARGARED
O ciel! je ne te vois
Qu'au travers de mes larmes!
Prends pitié de mes larmes!
Secourez­moi, Dieu puissant!

LE ROI
La Foi sera ton bouclier
Aux plaines où tu vas descendre,
Pour tous ceux qu'il te faut défendre,
Combats sans peur, preux chevalier!

ROZENN
Ah! Mylio ! qu'il te souvienne
Que je mourrai des mêmes coups!
Puisque ta mort serait la mienne,
Défends­toi bien, mon cher époux!

MYLIO
Son époux !

LE ROI
Espère! Du combat reviens en vainqueur,
Et ma fille est à toi!

MYLIO
Dieu puissant!

MARGARED
Dieu vengeur!

(Trompettes au loin.)

LE ROI
Entends cet appel!
viens! ton souverain, ton père
Veut être près de toi jusqu'aux derniers instants!

MYLIO
Partons!

(Ils sortent)

ROZENN
(regardant du côté où Mylio est sorti)
Va! demain, c'est l'éternelle ivresse!

MARGARED
(elle se présente tout a coup à Rozenn)
Ou le deuil éternel!

ROZENN
(effrayée et comprenant que Margared est sa rivale)
Ah! tu l'aimais!

MARGARED
J'ai trop lutté. Enfin ma douleur éclate!
Quand chacun pour lui fait des vœux
On m'oubliait peut­être ?
Ceux­là que j'ai formés,
veux­tu pas les connaître?...

ROZENN
Quel sombre éclair est dans tes yeux!

MARGARED
Oui, que dans sa main trompée
Son épée ne soit qu'un roseau!

(s'exaltant de plus en plus)

Que l'ennemi qu'elle blesse
Se redresse Pour combattre de nouveau!

Et si la mort elle­même
Doit seule vous désunir Pars!
Mylio! c'est là mon vœu suprême!
Pars, pour ne plus revenir!

ROZENN
(avec indignation)
Tais­toi! tais­toi! Margared!
Quel délire t'entraîne?
Songe à ceux que maudit ton aveugle fureur,
Et tremble que le ciel où va ton cri de haine
S'indigne de l'entendre aux lèvres d'une sœur.

Ah! si j'avais souffert de la même torture
Et vu m on fiancé pour toi m ' abandonnant,
Peut­être je serais morte de ma blessure,
Mais en vous pardonnant!

Que ta justice fasse taire
La plainte de ton cœur brisé!
Comme le deuil qu'il a causé,
Notre amour fut involontaire!

En nous il est venu comme viennent les fleurs
Sous la rosée en pleurs,
Sans qu'on puisse voir qui les sème;

Par la même tendresse éblouis et charmés
Nous nous sommes aimés,
Avant de savoir que l'on aime;

Nos âmes l'une à l'autre allaient si doucement
Que nos chastes bonheurs nous ont semblé
vraiment être voulus par Dieu lui-même.

MARGARED
Soyez maudits!

ROZENN
Le ciel est avec nous!

MARGARED
Je me vengerai!

ROZENN
(montrant la statue de Saint Corentin)
Le Saint nous défendra!

MARGARED
Va! Tu peux faire appel
aux puissances des Cieux!
Que ton Saint vénéré sorte donc de sa tombe!
Qu'il entende mes vœux!
Et si son bras vengeur sur ma tête retombe,
Mon suprême soupir vous maudira tous deux!

ROZENN
Margared!

MARGARED
J'aime encore mieux te voir,
En ma folle détresse,
Un glaive dans le flanc qu'un autre amour au cœur!
Adieu! Adieu!

(Elle sort en menaçant.)

Scène 2

(Une plaine immense. A l'horizon la silhouette de la
ville d'Ys; à droite, une antique chapelle. Au lever du
rideau, Mylio est debout au milieu de la scène entouré
par ses soldats l'épée nue. Plusieurs groupes portent
des drapeaux et des armes enlevés à l'ennemi Au fond
et sur les côtés, des paysans et des femmes acclament
les vainqueurs)

LE CHŒUR
Victoire! Honneur à Mylio! Victoire!

MYLIO
Non! Ce n'est pas à moi qu'appartient tant de gloire.

(Montrant la chapelle.)

Il repose en ce lieu, celui qu'il faut bénir:
C'est à Saint Corentin
que tout doit revenir!

LE CHŒUR
C'est à Saint Corentin
que tout doit revenir!

(Des soldats s'avancent vers la chapelle et disposent
de chaque côté les drapeaux dont ils sont chargés.)

LE CHŒUR
Il nous a donné le courage
Qui nous a gagné ces drapeaux;
Que leur trame guerrière ombrage
Le lieu sacré de son repos.

MYLIO, CHŒUR
C'est lui qui pour les abattre
A secondé nos efforts!
Qui sait prier sait combattre,
Et les croyants sont les forts!

(Mylio, les soldats et la foule se retirent. Tous passent
devant la chapelle de Saint Corentin et s'inclinent. La
scène reste vide. Karnac s'avance lentement, abattu,
les vêtements en désordre.)

KARNAC
Perdu! Je suis perdu!
Mon armée est détruite!
Les plus vaillants sont morts;
le reste a pris la fuite;
Et pour suprême affront j'ai survécu!

(Margared apparaît au fond, enveloppée d'un
vêtement sombre. Elle écoute.)

Celui qu'ils imploraient à l'heure des combats
Leur demeure fidèle Et moi lorsque j'appelle
L'enfer à mon secours, l'enfer ne répond pas!

MARGARED
L'enfer t'écoute!

KARNAC
(qui a tressailli à sa voix, se retourne
et la reconnaît)
Margared! Ah! tu viens sans doute
Une fois encor m'outrager!

MARGARED
Je viens te venger!

KARNAC
Me venger ?

MARGARED
Ta haine a passé dans mon âme!

(Etendant la main vers la ville entrevue à l'horizon.)

Là­bas, tous m'ont trahie
et déchiré le cœur,
Et je n'ai plus d'amant, de père, ni de sœur
Dans la cité trois fois infâme!
Si tu veux nous unir,
Elle ne sera plus demain qu'un souvenir.

KARNAC
Ah! que pouvons­nous, quand à l'heure où nous
sommes une armée a péri pour l'avoir essayé?

MARGARED
N'avons­nous pas un allié
Plus terrible que tous les hommes?
L'Océan ?...

KARNAC
Que veux­tu dire?

MARGARED
Notre cité Par une écluse est défendue
Contre la mer au flot sans cesse tourmenté;
Qu'on ouvre cette écluse et la ville est perdue!

KARNAC
Pourquoi ne l'as­tu fait ?

MARGARED
La barrière d'airain
Ne saurait se mouvoir sous une seule main,
Et j'ai compté sur toi...

KARNAC
Si fort que soit l'obstacle, Je le briserai!

MARGARED
Viens donc!

(Ils s'éloignent et se dirigent vers la chapelle de Saint
Corentin. Arrivés devant la chapelle. Margared s'arrête
et s'écrie.)

Et toi, qui dors en ce lieu vénéré,
Allons! fais un miracle!
Pour défendre ton peuple, il est temps, lève­toi!

KARNAC
Partons!

(Le ciel s'obscurcit tout à coup. La scène est dans
l'ombre. Cri de terreur de Margared montrant la statue
qui s'anime.)

MARGARED
Ah ! regarde!

KARNAC
(avec terreur)
La tombe s'entrouvre...

(Se détachant sous une vive lumière, apparaît
Saint Corentin immobile.)

MARGARED
Je succombe sous l'effroi!

SAINT CORENTIN
Malheur sur vous !...
Puisqu'au fond de vos âmes
'a pas tressailli le remords,
Dieu, témoin de projets infâmes,
Fait sortir des tombeaux la voix des morts.

VOIX D'EN HAUT
Repentez­vous!

SAINT CORENTIN
(rudement)
Prince sans diadème,
Chef sans armée, Avare sans trésor,
O spectre de toi­même!
Pour rêver un forfait suprême
Es­tu lassé de vivre encor?

VOIX D'EN HAUT
Repentez­vous!

SAINT CORENTIN
(sévèrement, mais avec moins de rudesse,
se tourne vers Margared.)
Et toi que je retiens au penchant de l'abîme,
Désarme, en le fuyant, le céleste courroux.
Dieu qui venge le crime
Pardonne au repentir!

(tombe à genoux).

VOIX D'EN HAUT
Repentez­vous!



ACTE III


Scène 1

(Une galerie du palais d'Ys. A droite, l'entrée de la
chapelle. A gauche, la porte de la chambre de Rozenn,
précédée de quelques marches. Groupes de jeunes
seigneurs, compagnons de Mylio, et de Jeunes filles,
suivantes et amies de Rozenn. Entre les deux groupes
se tient Jahel, grand maître du palais)

JAHEL
Vous qui venez ici chercher notre maîtresse,
Il faut, suivant l'antique usage de l'Armor,
Envoyés de l'époux,
que votre vœu s'adresse
Aux gardiennes de ce trésor.

(Jahel se retire.)

JEUNES GENS
Ouvrez cette porte à la fiancée
Avec nous bien vite elle s'en ira,

JEUNES FILLES
Non!
D'un espoir trompeur votre âme est bercée.
Celle que l'on réclame ici restera.

JEUNES GENS
Ouvrez !
Toujours rester seule, est­ce point folie
Avec tant de grâce et tant de beauté?

JEUNES FILLES
Folie! On peut être sage en étant jolie,
Non! Et rien n'est si doux que la liberté.

JEUNES GENS
Ouvrez !

JEUNES FILLES
Non!

JEUNES GENS
Au moindre désir prêt à se soumettre...

JEUNES FILLES
Se soumettre!

JEUNES GENS
C'est un doux amant qui lui tend les bras.

JEUNES FILLES
Cet amant bientôt fera place au maître,
La porte pour lui ne s'ouvrira pas.

JEUNES GENS
Ouvrez!

JEUNES FILLES
Non!

MYLIO
(paraît au milieu de ses compagnons)
Puisqu'on ne peut fléchir ces jalouses gardiennes,
Ah! laissez­moi
Conter mes peines
Et mon émoi.

Aubade

Vainement, ma bien­aimée!
On croit me désespérer;
Près de ta porte fermée
Je veux encore demeurer.

JEUNES FILLES
Vainement près de sa porte
Il veut encor demeurer.

MYLIO
Les soleils pourront s'étendre.
Les nuits remplacer les jours.
Sans t'accuser et sans me plaindre
Là, je resterai toujours.

JEUNES FILLES
Toujours, toujours!

MYLIO
Je le sais, ton âme est douce,
Et l'heure bientôt viendra
Où la main qui me repousse
Vers la mienne se tendra.

JEUNES FILLES
Vainement près de sa porte
Il veut encor demeurer!

MYLIO
Ne sois pas trop tardive
A te laisser attendrir,
Si Rozenn bientôt n'arrive,
Je vais, hélas! mourir.

(Rozenn en grande toilette de mariée
paraît sur le seuil de la porte.)

LE CHŒUR
Salut à l'époux comme à l'épousée!

ROZENN
(à ses amies).
Pourquoi lutter de la sorte;
Pensez­vous que je voudrai
Laisser l'amant à la porte
Lorsque l'époux est entré?

(A Mylio.)

Puisqu'une âme rebelle
eut briser si noble cœur,
J'entends la voix qui m'appelle:
Soyez mon maître et seigneur.

LE CHŒUR
Pour être bénis. marchez à l'autel!

ROZENN
Où cela pourra vous plaire,
Avec vous emmenez­moi:
Toujours, clémente ou sévère
Votre loi sera ma loi.

C'est une douce chose
De tenir ce qu'on promet,
Quand le devoir qui s'impose
Est le rêve qu'on formait.

LE CHŒUR
Sur vos jeunes fronts descendront bientôt
Les grâces du ciel!

(Le cortège se forme lentement
et se dirige vers la chapelle.)

Te Deum laudamus!

(Entrent Karnac et Margared. Celle­ci se dirige vers
la chapelle et demeure perdue dans une contemplation
douloureuse. Karnac est agité et regarde de tous côtés.)

KARNAC
Voici l'heure, viens!

LE CHŒUR
Te Dominum confitemur!

MARGARED
O Mylio!

KARNAC
(s'approche de Margared et l'interpelle brutalement)
Allons, pas de lâche faiblesse,
Ce palais est désert,
accomplis ta promesse!

MARGARED
(sombre)
Qu'ai­je promis ?

LE CHŒUR
Te Deum laudamus!

KARNAC
Tu dois me montrer le chemin
Qui conduit aux écluses!
Accomplis ta promesse!

LE CHŒUR
Te Deum laudamus!

KARNAC
Afin que sous les flots
déchaînés par ma main
Cette ville maudite ait disparu demain!
Pas de lâche faiblesse!
Accomplis ta promesse!

LE CHŒUR
Te Deum laudamus!

MARGARED
Vainement de lâcheté tu m'accuses!
Je ne veux plus commettre
un tel crime!

LE CHŒUR
Te Deum laudamus!

MARGARED
Oubliant les terreurs de la funeste plaine,
Veux­tu que Dieu par nous soit encore outragé ?

KARNAC
Ah ! mon seul souvenir est celui de ma haine!
Et je n'ai que l'effroi de n'être pas vengé !

(Avec ironie, montrant la chapelle.)

Vois ton amant joyeux et beau,
Ton amant incliné
Près d'une autre femme!

MARGARED
Tais­toi! Tais­toi!

KARNAC
Faut­il donc que ce jour
Qui voit ton désespoir consacre leur amour ?

MARGARED
Hélas ! secourez­moi!
Dieu puissant! Secourez­moi!

LE CHŒUR
Te Dominum confitemur!
Te Deum laudamus!

KARNAC
Ils vont sortir de la chapelle,
Le cœur tremblant d'un doux émoi;
L'une songeant: il est à moi!
L'autre disant: comme elle est belle!
Et puis ils s'en iront et les vents embrasés
T'apporteront ce soir le bruit de leurs baisers.

MARGARED
(affolée)
Tais­toi! Ah! qu'ils périssent!

MARGARED, KARNAC
Viens! Que la mer emporte
en ses profondes eaux
Ceux qui s'aiment ou se haïssent,
Que la mer emporte
victimes et bourreaux!

(Ils sortent rapidement. Le cortège nuptial
sort de la chapelle.)

LE CHŒUR
Salut à l'époux comme à l'épousée!
Le ciel a béni leurs jeunes amours.
Que sur leur destin comme une rosée,
Les grâces du ciel descendent toujours!

ROZENN
Cher Mylio!

MYLIO
Oui, le Seigneur est bon pour nous,
Il nous délivre de cruels ennemis
Puis il met votre main dans la mienne.
Ma Rozenn, je t'aime.

ROZENN
O mon époux! je t'aime, ô Mylio ! Je t'aime!

MYLIO
A l'autel j'allais rayonnant!
Mon amour était ma prière,
Je tremble maintenant
D'un bonheur trop grand pour la terre.
Dieu qui me remet, comme un trésor sacré
Un de ses anges sous ma garde,
Désormais me regarde.

ROZENN
Dans mon cœur enivré
Ne tressaille qu'une pensée,
C'est que toujours je sentirai
Ma main par la tienne pressée,
Je ne connais, et n'ai connu jamais
Que la route par toi suivie,
Et ta vie est ma vie!

MYLIO
Que le ciel, se penchant sur nous,
Mêle son éternelle flamme
Au baiser que l'époux
Donnant toute son âme,
Met au front de la femme!

ROZENN
Je t'aime! O cher époux!
A toi toute ma vie!

MYLIO
Des chemins où tu dois marcher à mon côté,
Sois la seule clarté,
De tous mes rameaux sois la rose!

ROZENN
Mylio!

MYLIO
Et, laissant jusqu'au soir
tes regards dans les miens,
En mes songes reviens
Quand ma paupière sera close.

ROZENN, MYLIO
Aimer, c'est la loi sainte, la douce loi!
Dans l'ivresse infinie, à toi, toujours à toi!
Je t'aime et mon coeur,
enfin, sur ton coeur se pose!

(A ce moment, le Roi reparaît au fond de la galerie,
il s'avance lent et triste. Rozenn, d'un geste affectueux,
éloigne doucement Mylio qui la laisse seule avec son
père.)

ROZENN
Je reviendrai bientôt, mon père!
Ne soyez donc pas triste ainsi!

(Margared parait au fond et écoute.)

LE ROI
Et l'autre enfant qui me quitta naguère,
Pourrai­je la revoir aussi ?

ROZENN
Margared reviendra !... J'ai tant prié pour elle!...

MARGARED
(à part)
Leur cœur à tous les deux m'ait resté fidèle!

LE ROI
Que le ciel exauce tes vœux!

MARGARED
O remords!

ROZENN, LE ROI
Que dans l'asile choisi
Elle trouve en sa détresse
Un peu de cette tendresse
Qu'elle a méconnue ici!

MARGARED
(à part)
Leur douce pitié m'accable et m'oppresse.

ROZENN, LE ROI
Surtout, ô Dieu bon! Permets
Qu'un jour l'enfant se rappelle
La demeure paternelle.

ROZENN
Oui, permets que l'enfant se rappelle
Son père qui ne l'oubliera jamais.

MARGARED
(à part)
O mon père!

ROZENN, LE ROI
Dieu puissant,
tu sais qu'elle est pardonnée,
Dans la demeure abandonnée,
Ramène bientôt son enfant!

(Rumeurs et cris au dehors
qui vont grandissant.)

LE ROI
Ces rumeurs, ces cris d'alarme,
Qu'est­ce donc ?

(Il se retourne et aperçoit Margared.)

Toi! ma fille!

ROZENN
(court se jeter dans les bras de sa sœur)
Margared, ô ma sœur!

MARGARED
Fuyez! Ces rumeurs confuses,
Ce sourd mugissement à chaque instant plus fort,
C'est la voix de la mort qui s'approche!

ROZENN
La mort ?

MYLIO
(entrant subitement)
Oui!... de coupables mains ont ouvert les écluses!

ROZENN
Grand Dieu!

LE ROI
Le nom de cet infâme ?

MYLIO
Karnac! je l'ai tué!
Le flot se précipite!
La mer vient sur nous!

VOIX AU DEHORS
Fuyons vite! Fuyons tous
Dieu puissant, secourez­nous

ROZENN
O Mylio!

MYLIO
Rozenn, Dieu nous laissera vivre!

(Il entraîne Rozenn.)

LE ROI
(à Margared)
Viens, ma fille, viens!

ROZENN, MYLIO, LA FOULE
Fuyons vite! Fuyons tous !

MARGARED
(elle résiste au Roi avec désespoir)
Je ne dois pas vous suivre!
Je ne dois pas vous suivre
Le remords me le défend!

LE ROI
L'amour m’ordonne à moi de sauver mon enfant.

(Il entraîne Margared, et tous sortent précipitamment.)

LE CHŒUR
Fuyons!

Scène 2

(Le plateau d'une colline où le peuple s'est réfugié.
Au loin une mer houleuse et sombre. A gauche, sur
les rochers, un groupe d'hommes observant les progrès
des flots dont on entend les grondements)

LE CHŒUR
O Puissance infinie!
Qui par ta volonté
Fais le flot irrité
Ou la vague aplanie,
Aujourd'hui prends pitié
De l'impuissance humaine!
Sur ton peuple agenouillé
Etends ta main souveraine!
L'eau monte, l'eau monte encore!

LE ROI
Je n'ai plus de cité! La moitié de mon peuple
est déjà chez les morts.

MYLIO
Epargne au moins ceux qui survivent!

LE CHŒUR
Épargne­nous, Seigneur! L'eau monte!
Sur ton peuple agenouillé
Etends ta main souveraine!
Prends pitié!

MYLIO
Avant ce jour jamais les flots n'ont atteint ces sommets!

MARGARED
(s'avance parlant comme dans une vision et répétant
des paroles entendues. Toute la foule s'est levée et
l'écoute avec anxiété.)
Allant où le maître l'envoie,
Toujours l’Océan montera!
Quand il aura reçu sa proie,
Soudain le flot s'apaisera!

LE CHŒUR
Que dit­elle ?
L'eau monte toujours
! L'eau monte encor!

LE ROI
(à Margared)
Si tu sais quelle est la victime
Qui doit descendre aux gouffres entrouverts,
Nomme­la donc!

MARGARED
C'est moi!

TOUS
Margared!

LE ROI
Et quel came as­tu commis ?

MARGARED
Complice d'un pervers,
Sur la cité, sur vous,
j'ai déchaîné les mers !

LE CHŒUR
Mort à l'infâme!
Frappons sans merci!
Perfide femme, qu'elle meure ici!
Par tous maudite et par tous condamnée!
L'Enfer t'appelle et ton heure est sonnée!

ROZENN
Grâce pour ma sœur!
Cédez à ma douleur!

MYLIO, LE ROI
Apaisez votre fureur!
Cédez à sa douleur!

LE CHŒUR
Frappons! Mort à l'infâme!
Frappons sans merci!
Par tous maudite, etc.

ROZENN, MYLIO, LE ROI
Grâce!

LE CHŒUR
Mort! Frappons sans merci!
L'eau monte encor!

LE ROI
O peuple! souviens­toi,
Si grand que soit le crime et juste la sentence,
Qu'à Dieu seul appartient
le soin de la vengeance.

LE CHŒUR
L'eau monte toujours!

MARGARED
Vous combattez le ciel en combattant pour moi.
Ah! mon juge m’appelle!

(Voilent coup de tonnerre. Effroi du peuple. Margared
profite de l'effroi général pour se débarrasser de ceux
qui la retenaient; elle s'élance à travers les groupes,
court au fond de la scène vers le rocher le plus élevé,
le gravit, arrive au sommet du rocher.)

MARGARED
Seigneur! Sauve un peuple innocent!
Pardonne a l'âme criminelle!

TOUS
Ah !

(Margared se jette dans la mer, Mylio court vers le
rocher. Rozenn, désespérée, s'élance avec Mylio et
gravit le rocher en même temps que lui. Au moment où
ils vont atteindre le sommet, Saint Corentin, enveloppé
d'un rayon lumineux, se dresse devant eux à la place
où se trouvait Margared et les arrête d'un geste
impérieux.)

LE CHŒUR
O justice ! O terreur!
Seigneur, sauve un peuple innocent!
Pardonne à l'âme criminelle!

(Le Saint disparaît, le ciel s'illumine instantanément,
une blanche clarté s'épand sur les vagues calmées.
La foule se relève, et reconnaissante tend les bras vers
le ciel.)

MYLIO
Gloire à Saint Corentin, qui sauve
Un peuple innocent!
Gloire à Dieu tout­puissant!

LE CHŒUR
Gloire à Dieu tout­puissant!



ACTO 1


Obertura

(Terraza del palacio real de Ys. A la izquierda,
los jardines. A la derecha, la entrada del palacio
con una inmensa escalera. Al fondo el mar.)

CORO POPULAR
¡Qué felicidad! ¡Llegó la bendita aurora,
la hora gozosa de las emociones!
Todo temor ha sido desterrado,
confiamos en tener tiempos mejores.

¡Que la ciudad antigua despierte rejuvenecida
para aclamar a la hija de nuestros reyes!
Esta niña por sus encantos,
sometió a un celoso rival;

Derrotado por sus miradas encantadoras,
más fuertes que nuestras armas,
lo vimos caer de rodillas.
Olvidemos nuestros temores,
el amor ha triunfado para nosotros.

¡Levantemos los estandartes!
Embellezcamos las puertas de nuestras casas.
¡Que mensajeras de la paz,
suenen las campanas en toda la ciudad!

JAHEL
Sí, señores, es la hora en que el rey, nuestro señor,
pondrá la corona de oro sobre la cabeza de su hija
y en que el príncipe Karnac llevará al altar
a la hermosa Margared, la perla del amor.

CORO
¡Qué felicidad!

JAHEL
¡Por medio de esta feliz boda,
por la paz que él nos da,
San Corentin, protector de la tierra bretona,
nos brinda su ayuda!

CORO
¡Que él siempre nos proteja!

CORO DE MUJERES
¡Las guerras terminaron,
hoy comienza para nosotros
una era de trabajo productivo
y de dulce paz!

Las espadas van a descansar
para siempre colgadas en la pared,
y los himnos guerreros
dejarán paso a las canciones de amor.

CORO
¡Alegría!
¡Hoy comienza para nosotros
una era de prosperidad!
¡Qué felicidad!

¡Cuando los reyes tienen juventud,
los pueblos tienen alegría!

(Suenan trompetas en el exterior)

JAHEL
¿Oís la señal? ¡En el horizonte aparece ya
nuestro glorioso huésped!

CORO
¡Es él, es nuestro señor!
¡Pronto lo veremos!
¡Pronto va a aparecer!
¡Eso nos hace felices!
¡Alegría!

¡Cantemos todos con entusiasmo!
¡Celebremos todos su llegada!
¡Alegría!

¡Gloria a nuestro señor!
¡Pronto va a aparecer!
¡Vamos a su encuentro
démosle la bienvenida!

¡Cantemos, con entusiasmo!
¡Él nos hará felices!

(Las canciones se pierden en la lejanía. Las
princesas Rozenn y Margared aparecen en lo
alto de la escalinata y descienden despacio hacia
la escena. Margared parece preocupada)

ROZENN
¡Margared, oh, hermana mía!
Cuando todos los rostros irradian alegría,
el tuyo está pálido y en tus ojos brilla
una llama oscura...
¡Tu mano tiembla!

(Margared retira su mano de la de Rozenn,
que ella le había tomado.)

MARGARED
¡Rozenn! ¿Qué dices?
No, mi corazón está feliz.

¡Qué! ¡A mi paso encuentro
personas encantadoras!
¡Un príncipe al que temíamos
fue doblegado por mis encantos!

Tengo el poder real,
tengo el cetro de nuestros antepasados,
¡y tú dices que estoy pálida!
¿Que ves angustia en mis ojos?

Si mi mirada se ilumina,
es por estar delante de tanto esplendor.
¡Y mi frente sólo se inclina
por el peso de la felicidad!

ROZENN
(para sí)
¡Ah! ¡Bajo sus exclamaciones de orgullo
subyace un sollozo!

(a Margared)

¿Por qué sufrir en silencio?
¡Sobre mi pecho vierte tus penas!
¡Que la mitad de ellas me pertenecen,
mi pequeña tontuela!

Se puede ver como el fresco rocío
estimula al tembloroso lirio.
A veces una lágrima derramada
alivia también nuestra alma.

MARGARED
Yo no tengo por qué llorar en silencio.
Y tu misericordia, no entiendo.

En silencio quiero sufrir,
y tus suaves palabras son en vano.
¿Por qué tengo una pena
que tú no puedes consolar?

ROZENN
Para poner fin a una guerra sangrienta,
nuestro padre te prometió al príncipe Karnac.
¿Estás conforme con este matrimonio?

MARGARED
(sombría y resignada)
¡Cumplo con mi obligación sin dudarlo!
Y no hay en mí, hoy,
más tristeza de la que había ayer.
¡Y mañana no habrá ninguna!

ROZENN
Entonces ¿por qué en tu cara
leo signos de amargura?

MARGARED
(sin poder contenerse)
¡Es que llevo en mi alma
la imagen de otro ser amado!

ROZEN
¿De otro?

MARGARED
(sobriamente)
¡Que ya no está!

ROZENN
(a Margared)
Eres otra Margared, ¿tal vez si viniera Mylio,
nuestro amigo de la infancia, aquél que
se marchó hace tiempo y para siempre...

MARGARED
(con la pasión y desesperación)
¡Ah! ¡Lo has dicho acertadamente!
¡Sí, la misma nave que se llevó a Mylio
se llevó muy lejos mi amor!

(Entra las damas del séquito de Margared,
que vienen a vestirla para la ceremonia
nupcial. Rozenn observa a su hermana y
se esfuerza por calmar su estado de ánimo,
tratando de demostrar no advertir la
desesperación de Margared.)

CORO
¡Ven, la hora se aproxima!
¿Por qué perder
un instante más, princesa?
La espera es cruel cuando
es tan hermoso lo esperado.
Vuestras damas están dispuestas,
en este preciso momento,
a poneros sobre la frente
el blanco velo de las novias
y la corona de nuestros reyes.

MARGARED
(a Rozenn)
Un esposo... detesto esto...
¡me esperará en el altar!
Y yo tendré... que jurarle... ¡eterna fidelidad!

ROZENN
¡Oh, hermana mía, entiendo tu dolor!

MARGARED
¿Querida Rozenn, comprendes ahora?

ROZENN
¡Ah! ¿Por qué no rechazaste
esta boda tan odiosa a tu corazón?

MARGARED
¡Ay, soy un botín de guerra!

ROZENN
¡No acuses a nuestro padre!

(Las damas se acercan y rodean
a Margared )

ROZENN
(apartada)
¡Vanamente hablé de la ausencia eterna
y de un futuro sin esperanza!
¡No! ¡no! ¡Yo no lo creo!...
¡Yo te espero, te llamo!
¡Oh, Mylio, presiento que volveré a encontrarte!

Por una lazo demasiado fuerte
ambos estuvimos unidos.
Dado que yo no he muerto,
tus días no se han acabado.

Si aquél a quien estoy llamando,
ya no existiera, ¡oh, inmensos cielos!
no habría tanta pasión
y tanto azul en mis ojos.

¡Oh, mar profundo y sereno!
¿Podrías sonreír,
si no estuvieras seguro
de devolverme mi tesoro?

Tú vienes permanentemente
a mis sueños y a mi memoria,
y una voz interior me dice
que vas a volver.

MYLIO
(entra por detrás de Rozenn)
Si el cielo está lleno de llamas,
¡oh, Rozenn! es porque él bien sabe
que en el momento en que tú me llames,
mi corazón temblará cerca del tuyo.

(Rozenn, inmóvil, tiembla y escucha como
en un sueño, sin atreverse a darse la vuelta.)

ROZENN
¡Esa voz!... ¿Es un sueño?

MYLIO
¡Oh, Rozenn, mi corazón palpita junto al tuyo!

(Rozenn se da la vuelta y se arroja
en los brazos de Mylio.)

ROZENN
¡Mylio! ¡Mylio!
¿Es posible esta alegría?

MYLIO
¡Soy yo! ¡Soy tu enamorado!
¡El Señor no fue insensible a tus ruegos!

ROZENN
¡El Señor es indulgente!

MYLIO
¡El Señor es indulgente!

ROZENN
Dijeron que te habías perdido en playas lejanas,
derrotado por un destino más fuerte que tu valor.

MYLIO
Estuve cautivo con mis compañeros,
pero luego logramos vencer.
¡Ahora estoy de vuelta, junto a ti!

ROZENN
¡Mi felicidad es tan grande
que apenas me atrevo a creer que es cierta!
¡Si se llegara a quebrar!...

(Se estremece mientras se oyen las trompetas.)

ROZENN
¡Ahí llega el príncipe y su comitiva!

MYLIO
¿El príncipe?

ROZENN
¡Es el esposo que mi hermana aceptó!

MYLIO
¡Voy a dejar en libertad a los amigos que,
celosos de mi privilegio, también desean
volver a ver sus casas y sus amadas!

ROZENN
¿Cuándo te veré?

MYLIO
Esta noche... mañana... siempre.

(Mylio se separa de Rozenn y por unos momentos
se aleja de ella. El Rey aparece en lo alto de la
escalera acompañado de Margared y de toda su
corte. Por el fondo entra Karnac y sus guerreros,
seguidos por todo el pueblo de Ys.)

KARNAC
(al Rey)
Ansioso por concretar la boda pactada,
olvidando los hechos que nos enfrentaron,
Rey de la ciudad de Ys,
¡el príncipe Karnac te saluda!

EL REY
¡En un antiguo rival encuentro a un hijo!
¡Bendito sea el destino que te trae a mi casa!

(Volviéndose hacia el pueblo.)

¡Y todos vosotros, escuchad mis palabras!

(La muchedumbre se acerca.)

He estado pensando en el futuro...
Mi edad ya es avanzada...
Para que mi muerte sea sólo un luto
y no un peligro,
para que nuestros hijos estén protegidos,
un fuerte brazo se une a una serena belleza
Ellos serán una autoridad poderosa y amable.
¡Margared, será vuestra reina!
¡Karnac, tú serás su esposo!

CORO
¡Les prometemos
obediencia en el futuro!
¡Oh, Rey, nosotros aceptamos a Karnac
como nuestro señor!
¡En los altares de Dios, vamos a bendecirlos!

(Durante la presentación, Rozenn se acercó
de Margared, la tomó de la mano, la alejó del
séquito y la llevó al frente de la escena; ella
le dice algunas palabras inaudibles en ferviente
y animada actitud.)

MARGARED
¿Qué? ¡Mylio vive! ¿Por qué milagro?

ROZENN
¡Me ha hablado, te lo aseguro!

MARGARED
(para sí)
¡Maldito día!

ROZENN
(con ternura)
¡Como él nos ama,
regresará junto a nosotros!

MARGARED
(para sí)
¡Él vive y yo debo unirme a Karnac
con un lazo eterno!

(El Rey se acerca a Margared
y la toma de la mano.)

EL REY
¡Ven, hija mía, ven a la capilla!

MARGARED
(reaccionando violentamente)
¡No, padre, jamás!

CORO
¿Qué dice? ¡Gran Dios!

MARGARED
Digo que te olvides de la promesa dada.
¡Porque yo rechazo esta boda
que hasta ayer me era indiferente y hoy odiosa!

EL PUEBLO DE YS
¡Qué demencia criminal!
De esta ofensa mortal,
Karnac querrá tomar venganza.
¡Si la guerra se vuelve a desatar, ay!
De su ejército
¿quién podrá protegernos?

LOS SOLDADOS DE KARNAC
De esta ofensa mortal
Karnac sabrá tomar la venganza,
¡Temblad! ¡Temblad!

KARNAC
¡Temblad! ¡Temblad!

EL REY
¡Oh, qué demencia criminal!

MARGARED
¿Qué me importa el peligro?

ROZENN
¿Nos queda alguna esperanza?

TODOS
¡Mylio!

KARNAC
¡Oh Rey, esto significa una guerra sin tregua,
una lucha sin clemencia!
¡Aquí está mi guante!

(Karnac tira su guantelete. Mylio, oculto hasta
este momento entre la gente, se adelanta)

MYLIO
¡Yo recojo el guante!

(La muchedumbre se aparta y permite
ver al fondo, los soldados de Mylio.)

TODOS
¡Mylio!

MARGARED, ROZENN
¡Mylio!

MYLIO
¡Sí, hemos venimos
para luchar contra vosotros!

TODOS
¡Es Mylio!

KARNAC
(con desdén)
Tú que así hablas,
¿tienes de la muerte un deseo tan grande?
Yo la desprecio y tú la estás buscando.

MYLIO
No, no es a ti a quien ella espera.
¿Buscabas una esposa y un lecho nupcial
al pie de estas torres?

EL PUEBLO DE YS
¡Viva Mylio! ¡Gloria a Mylio!

KARNAK, SOLDADOS
¡Temblad, temblad! ¡Muerte a Mylio!

(El pueblo de Ys se precipita sobre Karnac, el
Rey y Mylio dividido en dos grupos. Karnac y
sus soldados se retiran profiriendo amenazas.)



ACTO II


Escena 1

(En una gran sala del palacio de Ys, Margared,
junto a una ventana, mira hacia el campo)

MARGARED
Veo a todo lo ancho de la llanura a los soldados
de Karnac acercarse a nuestros muros.
¡Oh Mylio, si tú estás luchando denodadamente,
una lucha aún más áspera se libra en mí.

Cuando te vi reaparecer, de repente,
vivo e imponente como en otro tiempo,
de inmediato mi corazón volvió a renacer
con el fuego de tus ojos y el sonido de tu voz;

Sin importarme a quien hería,
quise correr hacia ti,
y en el entusiasmo de mi loca pasión
no me importaba nada ni nadie.

¡Ay, tantos días de llanto que sufrí,
hicieron que olvidara mis obligaciones!
Cubriendo poco a poco de vergüenza mi cabeza
y dejando mi alma vacía de esperanzas.

Yo siento que es a Rozenn,
a quien él ama y admira.
¡Sí, es a ella a quien dedica
sus dulces suspiros!

Y si lo veo sonreír
¡lo hace para ella!
Aún así, tengo esperanzas.
¡Tan grande es mi locura!
¡Cuando pierda toda las esperanzas,
vosotros que me golpeasteis
implorad por vuestro destino!
¡El amor del que nada me queda
en ese día dará paso
a un odio inextinguible!

(Llegan el rey, Rozenn y Mylio.
Margared se oculta)

EL REY
(a Mylio)
Que mañana, a la salida del sol,
comience la batalla.
¡Ve sin demora
a organizar nuestras tropas!

ROZENN
¡Oh padre, esta partida!...
Este combate... es odioso.

MYLIO
(con ternura)
¿Por qué tiemblas?

(Calmadamente)

Ante el altar de San Corentin,
el protector de Bretaña,
para que su gracia me acompañe,
lleno de ardiente fe estuve orando esta mañana.
Creí ver que el sagrado cuadro cobraba vida...
Una voz desde lo alto me susurró:
"Hijo mío, marcha al combate
con el alma tranquila;
¡Yo velo por mi pueblo y lo protegeré!"

¡Sí, yo lo oí, y doy fe de ello!
La salvación nos ha sido prometida.
¡Sólo para nuestros enemigos
mañana será un día nefasto!

Sin temor ni dudas,
podemos contar conque Él,
nos cubrirá con su sombra.
¡El Señor está de nuestra parte!

¡Es Él quien, derribando a nuestro enemigos,
auxiliará nuestros esfuerzos!
¡Quién sabe orar sabe combatir,
y la fe es su fuerza!

MARGARED
(oculta)
¡Ay! ¿Con tanta inquietud,
podré orar como antes?
¡Oh, cielo! ¡Limitada por mis lágrimas,
no puedo verte!

EL REY, MYLIO, ROZENN,
El cielo sabrá bendecir nuestras armas.
¡El triunfos nos ha sido prometido!
¡Sólo para nuestros enemigos
mañana será un día nefasto!

Sin temor ni dudas,
podemos contar conque Él,
nos cubrirá con su sombra.
¡El Señor está de nuestra parte!

¡Es Él quien, derribando a nuestro enemigos,
auxiliará nuestros esfuerzos!
¡Quién sabe orar sabe combatir,
y la fe es su fuerza!

MARGARED
¡Oh cielo, mis lágrimas
me dificultan poder verte!
¡Ten piedad de mi llanto!
¡Dios poderoso, auxíliame!

EL REY
¡La fe será tu escudo
en los llanos donde has de combatir!
¡Valiente caballero, lucha sin temor por aquellos
a los que tienes que defender!

ROZENN
¡Ah, Mylio!
¡Recuerda que yo moriré si tú mueres!
¡Porque tu muerte sería la mía,
defiéndete bien, amado esposo!

MYLIO
¿Tu esposo?

EL REY
¡Aún no! ¡Pero regresa victorioso del combate,
y mi hija será tuya!

MYLIO
¡Dios poderoso!

MARGARED
¡Dios vengador!

(Se oyen sonar trompetas a lo lejos.)

EL REY
¡Oid esa llamada!
¡Ven, tu soberano y padre,
quiere estar cerca de ti hasta el último momento!

MYLIO
¡Salgamos!

(Salen)

ROZENN
(mirando salir a Mylio)
¡Ve, mañana, nuestra felicidad será eterna!

MARGARED
(respondiendo a Rozenn)
¡O será un eterno luto!

ROZENN
(asustada y descubriendo en Margared a su rival)
¡Ah, tú lo amas!

MARGARED
Demasiado luché... ¡mi dolor estalla!
¿Talvez todos desearían
que me olvide de él?
¿No saben
lo qué hay en mi corazón?

ROZENN
¡Qué oscuro fulgor hay en tus ojos!

MARGARED
¡Que en su mano la espada
sea como una débil caña!

(exaltándose cada vez más)

¡Que el enemigo que sea herido por ella,
se levante para luchar de nuevo!

Y si la muerte es en sí misma,
separación,
¡Mylio, este es mi último deseo!
¡Vete, para no volver!

ROZENN
(con indignación)
¡Cállate! ¡Cállate, Margared!
¿Qué delirio te arrastra?
Pienso en esta maldición, fruto de tu furia ciega,
y temo que el cielo
escuche las palabras de mi hermana.

¡Ah! Si yo hubiera tenido que soportar
la misma pena,
y mi amado me hubiera abandonado,
habría muerto de dolor, ¡pero perdonándolo!

¡Que tu virtud acalle
las quejas de tu corazón herido!
¡A pesar del dolor que te causó,
nuestro amor no fue buscado!

Entre nosotros el amor nació como las flores,
bajo el rocío de las lágrimas,
sin saberse quien las sembró.

Con una misma y dulce ternura,
nos amamos,
antes de saber lo que era el amor.

Nuestras almas se unieron tan dulcemente,
que nuestra casta felicidad
provenía del mismo Dios.

MARGARED
¡Malditos seáis!

ROZENN
¡El cielo está con nosotros!

MARGARED
¡Me vengaré!

ROZENN
(señalando la estatua de San Corentin)
¡El Santo nos defenderá!

MARGARED
¡Ve, pues a llamar
a todos los poderes celestiales!
¡Que tu venerado Santo salga de su tumba!
¡Que él oiga mi voz!
¡Y si su brazo vengador cae sobre mi cabeza,
mi último suspiro será para maldeciros a los dos!

ROZENN
¡Margared!

MARGARED
¡Me gustaría volver a verlo, en mi airado dolor,
con una espada clavada en el costado
y otra hundida en su corazón!
¡Adiós! ¡Adiós!

(Sale amenazante.)

Escena 2

(En el horizonte de una inmensa llanura se
ve la ciudad de Ys; a la derecha, una ermita.
Al levantarse el telón, Mylio, espada en mano,
está en medio de la escena rodeado de sus
soldados, junto a ellos y amontonados, los
trofeos enemigos. Los aldeanos victorean a
los vencedores)

CORO
¡Victoria! ¡Honor a Mylio! ¡Victoria!

MYLIO
¡No! No es a mí a quien pertenece tanta gloria.

(Señalando la ermita)

Quien descansa en este lugar, nos ha bendecido.
¡Es a San Corentin
a quien todos debemos estar agradecidos!

CORO
¡Es a San Corentin
a quien todos debemos estar agradecidos!

(Algunos soldados se dirigen hacia la ermita y
colocan a ambos lados los estandartes enemigos)

CORO
Él nos dio el valor
para conquistar estas banderas,
que ellas formen un marco guerrero
sobre el lugar consagrado a sus restos.

MYLIO, CORO
¡Es él quien nos ayudó
a alcanzar el triunfo!
Quien sabe orar sabe luchar,
¡esa es la fortaleza del creyente!

(Mylio y todos los demás se retiran pasando ante
la capilla de San Corentin con una reverencia.
La escena queda vacía. Karnac llega lentamente
y abatido, sus ropa están en desorden.)

KARNAC
¡Derrotado! ¡Estoy derrotado!
¡Mi ejército fue destruido!
Los más valientes murieron,
y el resto huyó;
Y para mi afrenta suprema... ¡he sobrevivido!

(Margared aparece al fondo, cubierta con
vestimentas oscuras. Ella lo escucha.)

¡Antes del la batalla, ellos imploraron aquí
y fueron escuchados; y yo que invoqué al infierno,
no fui escuchado!

MARGARED
¡El infierno te escucha!

KARNAC
(se estremece al oír su voz, se da la
vuelta y la reconoce)
¡Margared! ¡Ah!
¡Sin duda tú también vienes para agraviarme!

MARGARED
¡Vengo buscando venganza!

KARNAC
¿Venganza?

MARGARED
¡Tu odio pasó a mi alma!

(Extiende la mano hacia la ciudad)

Allá, todos me traicionaron
y destrozaron mi corazón.
Ya no tengo amante, ni padre, ni hermana...
¡Esa ciudad es tres veces infame!
Si quieres unirte a mí,
mañana ella será sólo un recuerdo.

KARNAC
¡Ah! ¿Qué podremos hacer nosotros
si todo mi ejército fue destruido al intentarlo?

MARGARED
¿No tenemos un aliado más espantoso
que todos los ejércitos del mundo
en el océano?...

KARNAC
¿Qué quieres decir?

MARGARED
Nuestra ciudad está protegida de la constante
amenaza del mar por una compuerta,
si se abre esa compuerta... ¡la ciudad está perdida!

KARNAC
¿Por qué no la abres tú sola?

MARGARED
La compuerta de bronce
no se puede mover con una sola mano.
Yo contaba con tu ayuda...

KARNAC
¡Si ése es todo el problema, yo la abriré!

MARGARED
¡Entonces, ven!

(Se marchan en dirección a la ermita de San
Corentin. Al llegar ante la misma, Margared
se detiene y exclama.)

Y tú, que en este lugar eres venerado... ¡Adelante!
¡Haz un milagro para proteger a tu pueblo!
¡Es la hora, levántate!

KARNAC
¡Salgamos!

(El cielo se oscurece de repente. La escena
queda en sombras. El grito de terror de 

Margared señala que la estatua adquirió vida.)

MARGARED
¡Ah! ¡Mira!

KARNAC
(con el terror)
La tumba se entreabre...


(En el umbral, bajo una viva luz, aparece
San Corentin inmóvil.)

MARGARED
¡Me muero de miedo!

SAN CORENTIN
¡Desgraciados!...
Puesto que en el fondo de vuestras almas
no existe ningún remordimiento,
Dios, testigo de tan infame proyecto,
hace surgir de las tumbas la voz de los muertos.

VOZ DESDE LO ALTO
¡Arrepentíos!

SAN CORENTIN
(rudamente, a Karnac)
¡Príncipe sin corona,
general sin ejército, avaro sin tesoro,
oh, fantasma de ti mismo!
Sueñas con un destino supremo,
¿aún no estás cansado de vivir?

LA VOZ DESDE LO ALTO
¡Arrepetíos!

SAN CORENTIN
(severo, pero con menos rudeza,
dirigiéndose a Margared.)
¡Y tú, a quien yo salvé del abismo,
desiste, y evita la ira celestial!
¡Dios que venga el crimen,
perdona al arrepentido!

(se arrodilla).

LA VOZ DESDE LO ALTO
¡Arrepentíos!



ACTO III


Escena 1

(Galería del palacio de Ys. A la derecha, la
entrada a la capilla. A la izquierda, la puerta de
la habitación de Rozenn ante la que hay dos
grupos: uno formado por amigos de Mylio,
y el otro por damas de Rozenn. entre ambos
grupos está Jahel, el mayordomo del palacio)

JAHEL
Vosotros que venís aquí en busca
de nuestra señora, lo hacéis siguiendo
la antigua costumbre de la nobleza:
el esposo os envía a buscar a la novia
como guardianes del tesoro.

(Jahel se retira.)

LOS JÓVENES
¡Abrid esa puerta a la novia,
que con nosotros ella vendrá!

LAS DONCELLAS
¡No!
Una falsa esperanza habita en vuestras almas,
la que reclamáis aquí permanecerá.

LOS JÓVENES
¡Abrid!... ¡Siempre sola!
¿No es una locura teniendo
tanta gracia y belleza?

LAS DONCELLAS
¿Locura? ¡Se puede ser sabia a la vez que bella!
Nada es tan dulce como la libertad.

LOS JÓVENES
¡Abrid!

LAS DONCELLAS
¡No!

LOS JÓVENES
Debéis someteros a nuestros deseos...

LAS DONCELLAS
¿Someternos?... ¡No!

LOS JÓVENES
¡Es un dulce amante quien le tiende los brazos!

LAS DONCELLAS
Ese amante pronto se transformará en amo
¡La puerta para él no se abrirá!

LOS JÓVENES
¡Abrid!

LAS DONCELLAS
¡No!

MYLIO
(aparece en medio de sus compañeros)
¡Dado que no se puede doblegar
a estas incorruptibles guardianas,
¡Ah! dejad al menos que os narre
mis penas y sentimientos.

Alborada

¡Vanamente, mi bien amada!
Aún con desesperanza,
junto a tu puerta cerrada
quiero permanecer.

LAS DONCELLAS
Junto a su puerta él quiere
inútilmente permanecer.

MYLIO
Los soles podrán ponerse,
las noches reemplazar a los días,
sin recriminarte y sin compadecerme,
aquí permaneceré siempre.

LAS DONCELLAS
¡Siempre, siempre!

MYLIO
Lo sé bien, tu alma es dulce,
y pronto llegará la hora
en que la mano que me rechaza
hacia mí se tenderá.

LAS DONCELLAS
¡Junto a su puerta
él quiere permanecer!

MYLIO
Que no sea demasiado tarde
cuando cedas a mis ruegos,
si Rozenn pronto no viene,
¡ay, yo moriré!

(Rozenn vestida con un suntuoso traje de
novia aparece en el umbral de la puerta.)

CORO
¡Viva el esposo y la esposa!

ROZENN
(a sus amigos)
Por qué disputáis de esa manera;
¿Creéis que me gustaría
dejar a un amante
esperando en la puerta?

(a Mylio.)

Dado que un alma tenaz
ha doblegado tan noble corazón,
y oí tu voz que me llamaba:
¡sed mi amo y señor!

CORO
¡Vayamos al altar a celebrar las bodas!

ROZENN
¿Cómo podré complacerte?
¡Llévame siempre contigo!
Leve o rigurosa,
tu ley será siempre mi ley.

Es una cosa dulce
cumplir lo que se promete,
cuando el deber que se impone
coincide con lo que se ha soñado.

CORO
¡Sobre sus jóvenes cabezas
muy pronto bajará la gracia del cielo!

(El cortejo se forma lentamente y se
encamina hacia la capilla.)

¡Te Deum laudamus!

(Entran Karnac y Margared. Ella mira hacia la
capilla y permanece unos instantes en una actitud
apenada. Karnac se muestra agitado)

KARNAC
¡Ha llegado la hora, ven!

CORO
¡Te Dominum confitemur!

MARGARED
¡Oh, Mylio!

KARNAC
(se acerca a Margared y la interpela brutalmente)
¡Vamos, deja de lado todo temor!
Este palacio está condenado,
¡cumple con lo prometido!

MARGARED
(sombríamente)
¿Qué he prometido?

CORO
¡Te Denm laudamus!

KARNAC
¡Debes mostrarme el camino
que conduce a las compuertas!
¡Cumple con tu promesa!

CORO
Te Denm laudamus!

KARNAC
¡Bajo las aguas liberadas por mi mano
esta maldita ciudad
desaparecerá mañana!
¡No seas cobarde!
¡Cumple con tu promesa!

CORO
Te Denm laudamus!

MARGARED
¡Vanamente me acusas de cobarde!
¡No quiero comprometerme
con un crimen semejante!

CORO
¡Te Denm laudamus!

MARGARED
¿Has olvidado el horror de la fatal llanura,
y quieres que ofendamos de nuevo a Dios?

KARNAC
¡Ah, en lo único que pienso es en mi odio!
¡Sólo temo no lograr mi venganza!

(Con ironía, señalando la capilla.)

¡Mira a tu feliz y bello enamorado,
tu amante prefirió
unirse a otra mujer!

MARGARED
¡Calla! ¡Calla!

KARNAC
¿En posible que el día en que tú estás
más desesperada él consagre su amor?

MARGARED
¡Ay, ayúdame!
¡Dios poderoso, ayúdame!

CORO
¡Te Dominum confitemur!
¡Te Denm laudamus!

KARNAC
Van a salir de la capilla.
Su corazón se estremece con dulce emoción;
y ella le dice: ¡Eres mío!
y él responde : ¡Qué hermosa eres!
Esta noche, el cálido viento traerá
el rumor de sus besos.

MARGARED
(enloquecida)
¡Calla! ¡Ah!... ¡Que mueran!

MARGARED, KARNAC
¡Ven! ¡Que el mar arrastre
a sus profundidades
a quienes se aman y a quienes se odian!
¡Que el mar se lleve
a las víctimas y a los verdugos!

(se marchan rápidamente. La comitiva nupcial
sale de la capilla.)

CORO
¡Vivan los recién casados!
Que el cielo bendiga su joven amor!
¡Que en su futuro caigan siempre,
como el rocío, las gracias del cielo!

ROZENN
¡Amado Mylio!

MYLIO
Sí, el Señor ha sido bondadoso con nosotros,
pues nos liberó de nuestros crueles enemigos.
Pon tu mano sobre la mía...
Mi amada Rozenn, ¡te amo!

ROZENN
¡Oh, esposo mío! ¡Te amo, oh Mylio! ¡Te amo!

MYLIO
¡Al altar yo fui gozoso!
Mi amor era mi plegaria,
y ahora me estremezco invadido
por la felicidad más grande del mundo.
Dios ha puesto, como un sagrado tesoro,
bajo mi guarda a uno de sus ángeles,
a quien cuidaré de aquí en adelante.

ROZENN
En mi corazón embriagado,
todavía late un pensamiento
que por siempre vivirá en él.
Mi mano toma la tuya,
y aunque nunca sepa
cuál es tu destino,
¡tu vida será mi vida!

MYLIO
Que el cielo nos ampare,
que confunda su eterno amor
con el beso que el esposo pone,
con toda su alma,
sobre la frente de su mujer.

ROZENN
¡Te amo! ¡Oh, querido esposo!
¡Eres toda mi vida!

MYLIO
Que en los caminos por los que debas
transitar a mi lado, seas la única claridad,
¡sé la rosa de mi jardín!

ROZENN
¡Mylio!

MYLIO
Y abandonándome
con tu mirada en la mía,
a mis sueños regresa
cuando mis párpados se hayan cerrado.

ROZENN, MYLIO
¡Amar, es ley divina, dulce ley!
¡En infinita embriaguez, tuya, siempre tuya!
¡Te amo y mi corazón,
finalmente, se posa sobre el tuyo!

(En este momento, el Rey aparece por el fondo
de la galería, se adelanta triste y lentamente.
Rozenn, con un gesto amoroso, se separa de
Mylio, que la deja a solas con su padre.)

ROZENN
¡Regresaré pronto, padre!
¡No estés triste!

(Margared, en el fondo, escucha.)

EL REY
Y mi otra hija, la que me dejó hace poco,
¿podré volver a verla?

ROZENN
¡Margared regresará!... ¡Oré tanto por ella!...

MARGARED
(para sí)
¡Su corazón aún me ama!

EL REY
¡Que el cielo te oiga!

MARGARED
¡Qué remordimiento!

ROZENN, EL REY
¡Que en el refugio
donde se haya escondido,
ella encuentre un poco de la ternura
que aquí ha rechazado!

MARGARED
(para sí)
Su dulce misericordia me agobia y oprime.

ROZENN, EL REY
Sobre todo, ¡oh, buen Dios!
permite que un día mi hija
regrese a la casa paterna.

ROZENN
Sí, permite que la niña recuerde a su padre,
que nunca la olvidará.

MARGARED
(para sí)
¡Oh, padre mío!

ROZENN, EL REY
Dios todopoderoso,
Tú sabes bien que ella ha sido perdonada.
¡A la casa abandonada,
devuelve pronto a mi niña!

(Rumores y gritos desesperados se van
oyendo en paulatino aumento.)

EL REY
¿Qué son esos rumores,
esos gritos de alarma?

(se da la vuelta y ve a Margared.)

¿Tú? ¡Hija!

ROZENN
(corriendo a los brazos de su hermana)
¡Margared, hermana mía!

MARGARED
¡Huid! Esos rumores confusos,
esos gritos sordos, cada vez más fuertes,
¡son los de la muerte acercándose!

ROZENN
¿La muerte?

MYLIO
(entrando)
¡Sí!... ¡Manos criminales abrieron las compuertas!

ROZENN
¡Gran Dios!

EL REY
¿El nombre del infame?

MYLIO
¡Karnac!... ¡Al que he matado!
¡Las aguas se precipitan!
¡El mar viene hacia nosotros!

VOCES DESDE EL EXTERIOR
¡Huyamos rápido! ¡Escapemos todos!
¡Dios poderoso, socórrenos!

ROZENN
¡Oh, Mylio!

MYLIO
¡Rozenn, Dios nos salvará!

(Lleva a Rozenn consigo)

EL REY
(a Margared)
¡Ven, hija, ven!

ROZENN, MYLIO, LA MUCHEDUMBRE
¡Huyamos rápido! ¡Huyamos todos!

MARGARED
(desesperada, se resiste al Rey)
¡No debo seguirte
¡No debo seguirte,
el remordimiento me lo prohíbe!

EL REY
¡El amor me ordena salvar a mi hija!

(arrastra a Margared, y ambos salen)

CORO
¡Huyamos!

Escena 2

(En lo alto de una colina dónde la población se
ha refugiado. A lo lejos un mar agitado y oscuro.
A la izquierda, sobre unas rocas, hay un grupo de
hombres que observan el avance de la marejada)

CORO
¡Oh, infinito Poder!
¿Quién, por tu voluntad,
hizo que las irritadas aguas del mar
inundaran la planicie?
¡Hoy imploramos piedad
por la indefensión de los hombres!
¡Sobre tu pueblo arrodillado
extiende tu mano soberana!
¡El agua sube, el agua sigue subiendo!

EL REY
¡Ya no tengo mi ciudad!
¡La mitad de mis súbditos ha muerto!

MYLIO
¡Salva por lo menos a los que sobrevivieron!

CORO
¡Sálvanos, Señor! ¡El agua sube!
¡Sobre tu pueblo arrodillado
extiende tu mano soberana.
¡Ten misericordia!

MYLIO
¡Nunca, las aguas alcanzaron tan alto nivel!

MARGARED
(se adelanta hablando como ante una visión y
repitiendo las palabras. Toda la gente se pone
de pie y escucha con ansiedad.)
¡Hasta allí, a donde el Señor lo envía,
subirá aún más el océano!
¡Cuando él haya alcanzado a su presa,
súbitamente el mar se calmará!

CORO
¿Qué dice?
¡El agua sube todavía!
¡El agua sigue subiendo!

EL REY
(a Margared)
Si sabes quien es la víctima
que debe descender al fondo del mar,
¡nómbrala!

MARGARED
¡Soy yo!

TODOS
¡Margared!

EL REY
¿Y qué falta has cometido?

MARGARED
Ser la cómplice de un perverso.
Sobre la ciudad, sobre todos vosotros,
¡yo liberé los mares!

CORO
¡Muerte a la infame!
¡Castiguémosla sin piedad!
Esa mujer pérfida ¡que muera aquí mismo!
¡Por todos maldecida y por todos condenada!
¡El infierno te llama! ¡Tu hora ha llegado!

ROZENN
¡Piedad para mi hermana!
¡Compadeceros de mi dolor!

MYLIO, EL REY
¡Aplacad vuestra furia!
¡Compadeceros de su dolor!

CORO
¡Castiguémosla! ¡Muerte a la infame!
¡Castiguémosla sin piedad!
Por todos maldecida, etc.

ROZENN, MYLIO, EL REY
¡Piedad!

CORO
¡Muerte! ¡Castiguémosla sin piedad!
¡El agua sigue subiendo!

EL REY
¡Oh, súbditos míos! Recordad que
por grande que sea el crimen,
y justo el castigo, solamente a Dios
corresponde aplicar la venganza.

CORO
¡El agua continúa subiendo!

MARGARED
¡Vosotros os enfrentáis al cielo por mi causa!
¡Ah! ¡El Juez me llama!

(Estalla un potente trueno. Se produce un
momento de terror general. Margared aprovecha
el miedo de la gente para librarse de aquéllos que
la tenían sujeta; corre hacia el fondo de la escena
y sube a la roca más elevada)

MARGARED
¡Señor, salva a los inocentes!
¡Perdona mi alma pecadora!

TODOS
¡Ah!

(Margared se arroja al mar. Mylio corre hacia
la roca. Rozenn, desesperada, llega al pie de la
roca al mismo tiempo que él. En el momento en
que ellos llegan a lo alto, aparece San Corentin,
envuelto en un rayo luminoso. El santo se sitúa en
el lugar desde donde se arrojó al mar Margared
y los detiene con un gesto imperioso.)

CORO
¡Oh, justicia! ¡Oh, terror!
¡Señor, salva a los inocentes!
¡Perdona nuestras almas pecadoras!

(El Santo desaparece y el cielo se ilumina
instantáneamente. Una claridad blanca se
expande sobre las olas ya en calma. La multitud
agradecida, eleva sus brazos al cielo.)

MYLIO
¡Gloria a San Corentin
que salvó a un pueblo inocente!
¡Gloria a Dios todopoderoso!

CORO
¡Gloria a Dios todopoderoso!



Traducido y Digitalizado por:
José Luis Roviaro 2010